Ouattara - Bédié : Du duo au duel

L’histoire de la Côte d’Ivoire retiendra qu’en 1993, après le décès de Félix Houphouët-Boigny, Alassane Ouattara, alors Premier ministre, et Henri Konan Bédié, Président de l’Assemblée nationale, se battaient pour accéder au trône. On parle alors de « la guerre des héritiers ». Ainsi commence la déchirure entre les « fils d’Houphouët », pendant une décennie de crise politique. Les retrouvailles de 2004, à la faveur du dialogue politique ivoirien au Ghana, rapprochent ces deux personnalités, qui actent leur rapprochement par la naissance du RHDP, en 2005. C’est l’idylle parfaite, en apparence sûrement, jusqu’à l’accession au pouvoir d’Alassane Ouattara, en 2010. Moins de dix ans après, les deux hommes se retrouvent à nouveau face à face.

Match retour pour les uns, bataille de Kirina pour les autres, vidage du long contentieux qui perdure depuis 1993 pour certains. Les candidatures d’Alassane Ouattara et d’Henri Konan Bédié ont crispé les attentions et font craindre à plus d’un des risques d’un retour à des violences. Après l’éclatement de la joie des partisans d’un autre mandat pour Alassane Ouattara, l’opposition conteste de plus en plus le retour dans le jeu politique de celui qui avait, début mars, annoncé sa retraite. Au-delà de tous les débats, on s’achemine allégrement vers un face à face entre deux personnalités qui, depuis une trentaine d’années, sont passés d’un duel à un duo et vice-versa. Aujourd’hui elles s’apprêtent à vider pour de bon, et cette fois dans les urnes, un contentieux qui maintient la Côte d’Ivoire dans une sorte de position d’’otage. Trente ans après, on peut dire que le climat politique ivoirien n’a pas changé. La reconfiguration, tant attendue pour 2020, est un rendez-vous manqué. Dix ans après la crise postélectorale, les Ivoiriens s’apprêtent à vivre de nouveau des jours sombres. Entre espoir et peur, certains pensent solder de vieilles querelles.

Dernière bataille ? S’il avait annoncé que la campagne électorale de 2010 était sa dernière bataille politique, Henri Konan Bédié (86 ans) n’a pas digéré sa défaite cette année-là. Même s’il a soutenu Alassane Ouattara, il n’a jamais abandonné son projet de retour à la magistrature suprême, note un observateur de la vie politique ivoirienne. « Quand la Constitution de 2016 lui a été présentée, Bédié a juste souhaité que le verrou d’âge saute. Il avait déjà son idée déjà derrière, comptant sur le fait qu’en 2020, le RDR, dans le cadre de l’appel de Daoukro, passe le flambeau au PDCI afin qu’il puisse se présenter », explique avec regret un cadre du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Mais, au Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), on estime légitime la candidature d’Henri Konan Bédié. « Il est celui qui peut réconcilier les Ivoiriens et poursuivre au mieux l’œuvre d’Houphouët, tout en maintenant la cohésion au sein du parti », explique Basile Gouly, un cadre du PDCI qui milite depuis 2018 pour une candidature d’Henri Konan Bédié. De son côté, Alassane Ouattara, pour lequel l’alternance en 2020 devrait se faire par rapport à sa « personne » et avec « le plus compétent des cadres du RHDP », avait également sa petite idée sur son successeur. S’il souhaitait prendre sa retraite, il espérait convaincre Henri Konan Bédié d’en faire autant. Face à cet échec et à la mort brusque du défunt Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, sur lequel il avait misé dès 2017, « les choses se sont imposées à lui », le défend-on dans son entourage. Après le premier clash entre ces deux personnalités en 1993, qui s’était soldé par un putsch en 1999, les Ivoiriens retournent presque dans le passé. Même si la peur des lendemains tumultueux gagne les cœurs de plusieurs, pris en otage et partagés entre leurs différents leaders, ils restent convaincus que 2020 ne pourra pas « vider ce contentieux. Bien au contraire, cela apparait comme une bataille de trop », pense un diplomate en poste à Abidjan. Mais, dans les deux camps, l’on se prépare à l’évidence. Les vieux démons ayant refait surface, il est temps, selon certaines voix, de les éliminer une bonne fois pour toute et de redéfinir la scène politique.

Arbitrage intéressé Laurent Gbagbo, Guillaume Soro, Albert Mabri Toikeusse apparaissent dans une telle configuration comme des arbitres « très intéressés et partisans ». Comme en 2000, une sorte de « Tout sauf Ouattara » revient au galop. Sauf que, cette fois, chacun des potentiels arbitre voit midi à sa porte et ne souhaite pas faire le lit d’un adversaire politique devenu par la force des choses un partenaire politique. Même s’ils sont ensemble, chacun prêche pour sa chapelle. Laurent Gbagbo et ses partisans, qui se voient éloignés à nouveau d’une élection après celle de 2010, sont face à plusieurs problèmes. « Se battre pour que Gbagbo puisse rentrer en Côte d’Ivoire le plus tôt possible, remettre son nom sur la liste électorale et faire de lui un candidat », explique le Professeur Anselme Séka, cadre du Front populaire ivoirien. Guillaume Soro se retrouve presque dans la même situation, sauf que, même s’il détient encore un passeport valide, il pourrait être interpelé à sa descente d’avion. Même si l’élection de 2010 a démontré que Mabri Toikeusse n’a pas une grande base électorale, dix ans après il veut tenter à nouveau sa chance et se positionner comme une autre voie. Chacun des trois voit en 2020 une année favorable à ses ambitions. « Difficile de dire si une alliance de l’opposition actuelle peut se traduire dans les urnes. Tous ces acteurs se sont côtoyés et la confiance n’est pas au beau fixe. Aucun n’a de garantie en aidant l’autre et chacun préfère jouer sa propre carte, sans être faiseur de roi », lance le politologue Firmin Kouassi.

Tensions ? En attendant le face à face entre Ouattara et Bédié qui se profile à l’horizon, chacun joue son va-tout. L’opposition multiplie les appels aux marches de ses partisans depuis le 7 août. Les premières n’ont pas connu un grand succès et ont occasionné des arrestations dans les rangs des marcheurs. L’on en compte près de 50 arrestations, dont 17 à Abidjan, lors de la marche devant la CEI, et 27 à Gagnoa le 10 août. Mais l’opposition n’en démord pas. Elle espère durcir le ton dans les jours à venir et multiplie les réunions et autres appels à la mobilisation. En face, le RHDP, parti au pouvoir, ne compte pas se laisser surprendre. Tout en maintenant l’agenda de son candidat et celui des activités du parti, il garde une oreille attentive aux mouvements et « ne compte pas laisser la rue aux mains de l’opposition », lancent certains de ces cadres. « Tous les ingrédients sont réunis pour une crise préélectorale. Même si la police est parvenue sans grand effort à disperser les manifestants ces derniers jours, il faut noter qu’ils n’étaient pas en grand nombre. Si l’opposition parvient à mobiliser plus de monde, l’on pourrait enregistrer des violences et des destructions de biens d’autrui, comme ce fut le cas le mardi 11 août à Daoukro, dans le fief de Bédié », fait observer Firmin Kouakou. Les jours à venir s’annoncent ainsi décisifs, tant pour le parti au pouvoir que pour l’opposition. L’échec ou la réussite des marches annoncées pour le jeudi 13 août définira la suite et la trajectoire de l’avenir proche du pays. Cela s’annonce aussi comme un test grandeur nature pour l’opposition qui, depuis une décennie, peine à mobiliser et est profondément divisée sur les méthodes et les objectifs. D’un face à face entre RHDP et PDCI, l’on pourrait jouer les avant-matchs entre RHDP et opposition. Une confrontation qui pourrait aboutir à un report de l’élection ou à un dialogue direct entre tous les politiques afin d’aplanir les divergences avant tout scrutin.

Yvann AFDAL

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