Les lois votées à l’Assemblée nationale ivoirienne ont été, jusqu’à ce jour, en majorité, des « projets de lois, à l’initiative du gouvernement.
Les élections législatives 2021 se tiennent dans un contexte marqué par une forte participation de l’opposition politique ivoirienne et de nombreux candidats indépendants.
Alors, ceux-ci, une fois élus, penseront-ils à proposer des lois qui servent l’intérêt général ? Feront-ils pour de bon, des propositions de loi en général et en particulier une proposition de loi portant statut de l’opposition politique afin de lui donner sa place dans l’articulation des jeux de pouvoir ?
Rangé dans les tiroirs En effet, Le mercredi 06 avril 2016, le Conseil des Ministres a adopté un « projet de loi » portant statut de l’opposition politique en Côte d’Ivoire. Ce projet de loi définit le cadre légal d’exercice des partis et groupements politiques, institue un chef de l’opposition, fixe les règles et procédures qui permettent de le designer et précise les droits et obligations de l’opposition. Ce projet de loi vise à « consolider la démocratie et à renforcer le rôle des partis se réclamant de l’opposition dans la construction de l’unité et de la cohésion nationales ». Malheureusement, cette initiative, esquisse d’une volonté politique d’organisation démocratique de l’opposition politique, est restée à l’étape de projet de loi.
Responsabilité des acteurs politiques L’année électorale 2020 a été caractérisée par des crises pré et post-électorales. Plusieurs partis et groupements politiques de l’opposition et des leaders de la société civile ont appelé à la désobéissance civile et au boycott actif de ladite élection. Tout au long de ladite année, l’opposition politique, les ONG internationales ainsi que la société civile ont dénoncé le rétrécissement de l’espace civique. Les articles 196 à 199 de la loi n°2019-574 portant code pénal sont à la base de ces restrictions des libertés de manifester.
En outre, sur le terrain, tous les jours, nous assistons à une inégalité de moyens entre les candidats. Cela ressemble à une campagne de David contre Goliath : Les candidats issus du parti au pouvoir semblent plus équipés que ceux de l’opposition. Cela démontre, si besoin n’en est, le caractère impératif de l’élaboration de lois portant statut de l’opposition politique et financement des campagnes électorales.
Cependant, l’analyse des « projets de société » des candidats montre qu’ils abordent timidement les thématiques relatives à l’élaboration de ce type de lois.
C’est pourquoi, nous devons nous poser les questions suivantes : en Côte d’Ivoire, à qui revient l’initiative de l’élaboration des lois ? En d’autres termes qui peut créer des lois ? Le gouvernement ? Les citoyens ? Le parlement (Députés et Sénateurs) ?
Le « projet de loi » et la « proposition de loi » Une proposition de loi est un texte préparé par un ou plusieurs parlementaires, qui peut devenir une loi s'il est inscrit à l'ordre du jour des travaux parlementaires et s'il est adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat. La proposition de loi se distingue du projet de loi qui, lui, est une initiative du gouvernement.
L’initiative de l’élaboration de la loi est donc une compétence partagée. Elle appartient à la fois au Gouvernement et aux parlementaires (députés et sénateurs).
L’opposition politique et la démocratie La démocratie offre les conditions idéales pour une bonne cohabitation entre les citoyens d’un Etat. Elle crée sa propre acceptabilité, réduit les crises et contribue à la stabilité donc à la cohésion sociale. Par contre, Les partis et groupements politiques constituent, pour les citoyens, une possibilité de participer au processus démocratique. Sur ce, Ils regroupent des intérêts et représentent des personnes avec des visions similaires. Sans partis politiques, il n’y aurait ni opinion[1], ni décisions. Et tout le monde s’exprimerait à tort et à travers. Les partis rendent donc la politique « conviviale ». Au parlement, l’opposition a pour mission de rassembler toutes les opinions contradictoires et ainsi de leur donner une voix. L’opposition est donc nécessaire à la démocratie. Elle doit contrôler le gouvernement. Pour ce faire, ses droits doivent être particulièrement protégés.
Au vu de tout ce qui précède, il ne serait pas superflu d’encourager l’opposition politique et les candidats élus, à exhumer le « projet de loi » portant statut de l’opposition politique en Côte d’Ivoire, à l’amender et à le proposer à la 1ere session de l’Assemblée nationale sous forme de « proposition de loi ».
Concomitamment à celle-ci, « une proposition de loi portant financement des campagnes électorales » faisant partie, selon nous, des « urgences démocratiques », devrait, elle aussi, faire l’objet d’une attention particulière à cette même session.
Par conséquent, pour protéger leurs droits, consolider leurs statuts et donc la démocratie, ces deux (2) propositions de lois devraient faire l’unanimité de l’opposition politique, des candidats indépendants ainsi que toutes les parties prenantes engagées dans la construction démocratique en Côte d’Ivoire.