Reporters sans frontières (RSF) a publié à la mi-avril un rapport baromètre de la liberté de la presse, où la Côte d’Ivoire se classe au 86e rang mondial en 2015, au même niveau que l’année précédente, loin derrière deux autres pays.
En Côte d’Ivoire, on prend les mêmes et on recommence. Classé 86ème sur 180 en matière de liberté de la presse en 2014, le pays n’a pas progressé en 2015, en dépit du fait qu’aucune violence envers les journalistes n’a été constatée. Si en 2014, RSF avait accusé la ministre de la Communication, Affoussiata Bamba-Lamine, d’atteinte à la liberté de la presse pour avoir demandé l’arrêt de la diffusion de deux émissions de chaînes sous-régionales, en 2015, aucune situation similaire n’a été relevée par l’ONG basée à Paris. Bien au contraire, les journaux ivoiriens ont bénéficié d’une aide à l’impression de 800 millions de francs CFA de la part de l’État, et ont même fait preuve de beaucoup de retenue lors de la présidentielle d’octobre dernier, comparativement aux élections de 2010.Forte de ces arguments, la ministre avait affirmé en 2013 que « la Côte d’Ivoire avance dans le bon sens et les choses vont en s’améliorant ». Cet avis n’est pas partagé par le directeur de publication du groupe Olympe (Soir Info et L’Inter), Vamara Camara. Pour lui, ce classement est « symptomatique du fait que le climat n’a pas changé en une année et qu’il y a des efforts à faire ».
Mais la répression ou les violences physiques n’étant pas les seules causes de ce statut quo, il faudrait donc regarder parmi les autres critères de RSF, notamment l’autocensure, qui pourrait expliquer ce classement peu honorifique pour la Côte d’Ivoire. Car au-delà des apparences, la presse ivoirienne reste marquée politiquement, tout comme ses journalistes. Si être classée devant le Mali (122ème), qui connaît des difficultés depuis 2012, et derrière le Sénégal (44ème) parait logique, il semble en effet surprenant que ce pays se retrouve loin derrière son voisin du Nord, le Burkina Faso (42e), qui a connu en septembre 2015 un coup d’État manqué, notamment marqué par des violences contre les professionnels des médias. Les autorités ivoiriennes, mais aussi les journalistes, sont donc interpellés.
Michèle IRIE