Célébrée chaque année au sein de la communauté N’Zima Kôtôkô de Grand-Bassam, la fête de l’Abissa est l’occasion de critiques, de confessions et de pardon. Cependant, pour l’édition 2018, des doutes planent quant à son organisation.
Prévue pour démarrer le samedi 20 octobre et s’achever le dimanche 4 novembre prochain, la fête de l’Abissa chez les N’Zima Kôtôkô de Grand-Bassam symbolise les concepts de démocratie et de justice sociale. Les participants se retrouvent autour de leur chef, au son des tamtams, pour faire le bilan de l’année écoulée, dénoncer les injustices subies ou se confesser publiquement, dans le cadre d’une demande de pardon aux siens et d’un repentir. Depuis plusieurs années, cette fête, qui dure deux semaines (une semaine de réflexion et une semaine publique) est suivie par toute la Côte d’Ivoire, surtout les Abidjanais, qui se déplacent massivement pour l’occasion. Mais, pour cette édition 2018, des heurts ont éclaté au lendemain de la proclamation des résultats des municipales dans la ville de Grand-Bassam. Un contentieux électoral oppose le maire sortant Georges Philippe Ezaley et Jean-Louis Moulot, déclaré vainqueur par la Commission électorale indépendante (CEI). Les infrastructures de la mythique place Abissa ont été incendiées par des manifestants, menaçant ainsi la tenue de la fête.
Doutes Si l’Abissa est plus qu’attendue par le peuple N’Zima Kôtôkô, le Comité d’organisation souhaite faire les choses conformément à la tradition. « La place est importante, c’est un site de rassemblement. On ne peut donc pas célébrer la fête tant que les lieux ne sont pas purifiés », estime le Président du Comité d’organisation, Jean-Baptiste Amichia. « C’est un endroit où l’on célèbre le dialogue. Et dès l’instant qu’un site dédié à l’expression de la critique sociale a servi de cadre à une manifestation violente, la tradition exige qu’on le purifie pour lui redonner sa capacité à accueillir un dialogue constructeur, pour que la population puisse vraiment présenter ses doléances ». Selon l’organisation, l’Abissa 2018 devait s’ouvrir le 21 octobre avec le « Siédou », la sortie du tam-tam sacré pour aller le déposer dans la clairière. Cette étape annonce la semaine du « silence », qui permet au peuple de faire le bilan. « Cette étape de l’Abissa aura lieu après la période de purification et seulement lorsque nous aurons l’accord de la royauté», indique le Président du Comité d’organisation. Pour l’heure, des réunions conduites par les organisateurs et le roi des N’Zima Kôtôkô, l’Awoulae Amon Tanoé, sont organisées pour décider de la tenue ou du report de l’Abissa.
Anthony NIAMKE