Le Président philippin Rodrigo Duterte a pressé le lundi 22 juillet les parlementaires de rétablir la peine de mort dans le cadre de sa lutte musclée contre les drogues, critiquée dans le monde entier et au nom de laquelle la police a déjà tué des milliers de personnes.
Jouissant de taux de popularité exceptionnels et soutenu par un Parlement dominé par ses alliés, M. Duterte a profité de son discours annuel sur l’état de la Nation à Manille pour exhorter à l’action sur un élément-clé de son programme anti-criminalité.
« Je demande respectueusement au Congrès de rétablir la peine de mort pour les crimes odieux liés aux drogues et aux pillages », a-t-il déclaré, en référence à la corruption endémique dans le pays.
Bien qu’il soit visé par une enquête préliminaire de la Cour pénale internationale pour sa campagne anti-drogues, que les Nations unies passent également au crible, Rodrigo Duterte s’est montré très peu inquiet.
« Si vous me fournissez une cellule confortable, chauffée pendant l’hiver (…) et un nombre illimité de visites conjugales, nous pourrons nous entendre », a-t-il ironisé.
L’ONG Amnesty International a dit craindre les conséquences de cette initiative dans un pays où la police dit avoir tué plus de 5 300 trafiquants et consommateurs présumés de drogues. Selon des activistes, le bilan réel est au moins quatre fois plus élevé.
La peine de mort avait été abolie en 1987, avant d’être réinstaurée six ans plus tard et de nouveau abolie en 2006, à l’issue notamment d’une longue campagne de lobbying de l’Église catholique, qui compte 80% de fidèles dans l’archipel.
Journaliste en procès
En juin, il avait menacé ses détracteurs de les envoyer en prison s’ils tentaient de le mettre en accusation à cause de sa réaction en faveur de Pékin après un accident maritime en mer de Chine méridionale. Ce mardi s’est ouvert le procès pour diffamation de Maria Ressa, une journaliste philippine distinguée par le magazine Time et critique du gouvernement du Président Rodrigo Duterte. Ce procès découle d'un article écrit en 2012 sur les liens supposés entre un homme d'affaires et le président, à l'époque, de la Cour suprême de l'archipel. Le Président Duterte dément toute ingérence dans l'affaire. Il a fait de Rappler (le site de Ressa) la cible de ses critiques et l'a interdit de couvrir les événements publics, tout en empêchant les membres du gouvernement de parler à ses journalistes.
Boubacar Sidiki Haidara