Siré Sy : « S’il n’y avait pas de parrainages, nous en serions à plus d’une centaine de candidatures »

Pour Siré Sy, il y’a deux candidats qui pourraient faire la différence au Sénégal.

Siré Sy, Président du think tank Africa World Wide Group, répond aux questions de Journal du Mali sur l’élection présidentielle au Sénégal de février prochain.

19 candidats ont été écartés de la course pour un défaut de parrainages. Comment cela a-t-il été vécu ?

Il y a eu une satisfaction et une acception unanime du principe. S’il n’y avait pas ce filtre, nous en serions à plus d’une centaine de candidatures déclarées, ce qui allait techniquement fausser le jeu électoral. Ce sont les modalités pratiques et la mise en œuvre qui ont fait qu’il y a eu beaucoup de choses à dire. L’opposition estime que c’est un règlement de comptes, pour éliminer de potentiels challengers de l'actuel président, candidat à sa propre succession. Vu la complexité du parrainage, qui est une première au Sénégal, le gouvernement a jugé nécessaire d’associer la société civile, qui est venue assister le Conseil constitutionnel dans le dépouillement des listes de parrains. À l’épreuve du terrain, aussi bien le pouvoir que l’opposition se sont rendus compte que ce n‘était pas aisé à mettre en œuvre.

L’opposition accuse Macky Sall de faire barrage à ses principaux concurrents. Qu’en est-il ?

Tout dépend de l’angle d’approche. La revendication des tenants du pouvoir est fondée sur le droit. Il y a une procédure juridique en cours aussi bien pour Khalifa Sall que pour Karim Wade, qui invalide en soi et pour le moment leur candidature. Mais un problème se pose. Pour Karim Wade, la procédure judiciaire est arrivée à terme. De fait, il y a ce qu’on appelle l’autorité de la chose jugée. Pour Khalifa Sall, nous n’avons pas encore atteint ce stade. Et, dès lors, il est présumé innocent et ne perd donc pas ses droits civiques et politiques. Selon ses défenseurs, condamné en première instance, il a fait appel auprès de la Cour d’appel, qui a confirmé la condamnation. Maintenant il se pourvoit en cassation. Techniquement, d’ici au 24 février, date de l’élection, la procédure de rabat d’arrêt que les avocats de Khalifa Sall ont introduite ne pourra être vidée complètement. Juridiquement, Khalifa Sall peut être candidat, même du fond de sa cellule. C’est aujourd’hui toute la bataille de ses partisans.

Quels sont les candidats qui peuvent inquiéter Macky Sall ?

Il y a deux candidats qui, à mon avis, devraient être pris très au sérieux. Le premier, c’est Issa Sall, candidat du Parti de l’unité et du rassemblement, un parti extrêmement structuré car adossé à un mouvement religieux, les Mourtachidines, d'obédience tidiane. Il a déjà une base et un électorat fidèles. C’est un homme neuf, qui n'a jamais été dans le système politique. Le PUR  bat campagne là-dessus.

Le deuxième, c’est Ousmane Sonko. Il sera un peu la coqueluche. En politique, il y a des dimensions subjectives, qui relèvent de l’esthétique, qui au premier abord peuvent paraitre anodines, mais qui peuvent faire une grande différence auprès de l'électorat sénégalais, majoritairement jeune et genré. Ousmane Sonko est à la tête d'une coalition de partis et de mouvements. Il est relativement jeune (44 ans) et son discours est hors cadre et tranche avec ceux des politiciens habituels. Selon certaines femmes, il est beau. Ce sont des critères d’identification et des marqueurs sociaux qui font que beaucoup pourraient voter pour lui, même sans maitriser les contours de son programme.

Propos recueillis par Boubacar Sidiki Haidara

 
 
 
 
 

 

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