C’est devant 800 personnalités issues de tous les secteurs de la vie nationale que le Président du Tchad a lancé le 19 mars les travaux du Forum sur les réformes institutionnelles. Un vaste chantier, voulu par le chef de l’Etat tchadien.
Lundi 19 mars 2018, Palais présidentiel, N’Djamena. Ouverture du Forum national inclusif sur la réforme des institutions du Tchad. Le chef de l’État, Idriss Deby Itno, est présent et délivre un discours qui donne la teneur de l’évènement et confirme les craintes de ses opposants. Il annonce la « naissance » d’une 4ème République et enjoint les participants de doter le pays d’une nouvelle Constitution (la dernière date de 1996) et d’institutions fortes. L’exercice « est capital », affirme-t-il aux personnalités présentes, au nombre desquelles l’ancien président tchadien Goukouni Weddeye, des chefs religieux traditionnels, des membres de la diaspora.
Jusqu’au 27 mars, ils ont pour mandat de réfléchir, entre autres, sur le réaménagement des grandes institutions, l’instauration d’un régime parlementaire, avec la création d’un Sénat, la refonte des régions et le passage du mandat présidentiel de 5 à 7 ans, renouvelable une fois. C’est ce dernier point qui a provoqué le boycott des opposants au régime. Ils y voient une volonté manifeste de Deby Itno de se maintenir au pouvoir. Pour le chef de file de l’opposition, Saleh Kebzabo, « les problèmes du Tchad sont ailleurs. Les Tchadiens ne mangent pas à leur faim, les enfants ne vont pas à l’école… Quand va-t-on réformer en profondeur tout le système ? », s’interroge le candidat malheureux à la présidentielle de 2016.
Contre-forum. Pour Brice Mbaimong Guedoumbaye, Président du Mouvement des patriotes tchadiens pour la République (MPTR), pas question « d’assumer la responsabilité historique de participer à cette rencontre dont nous serons comptables demain ». Au moins une dizaine d’organisations de la société civile envisagent d’organiser un contre-forum le 23 mars, pour « dénoncer les objectifs réels de ce forum ».
Plutôt que d’aller vers une clause limitative, Deby veut s’ouvrir un boulevard à vie, en remettant les pendules à zéro, ce après 30 ans de règne sans partage. Au lieu d’un quinquennat, on s’achemine vers un septennat. « Deby est sur les pas des autres dictateurs africains qui refusent de s’imaginer une vie en dehors du pouvoir », commente un journaliste burkinabé. Avis largement partagé les autres observateurs. Pour eux, les défis actuels du pays sont liés à la mauvaise gouvernance et non aux institutions.
Célia d’Almeida