La mise en application des politiques de protection civile a souvent eu pour principaux obstacles les personnes qu’elles sont censées protéger. En Côte d’Ivoire, la coercition ne venant qu’en tout dernier recours, le respect des mesures doit être assuré par la sensibilisation, mais surtout par le suivi. Un suivi qui n’est pas toujours au rendez-vous.
Sensibiliser, ensuite sanctionner. C’est le modus operandi dans l’application des mesures de sécurité partout. En Côte d’Ivoire, on ne déroge pas à la règle. Pendant cette période de coronavirus, notamment, les autorités font feu de tout bois afin de porter le message, même aux confins du pays. L’un des éléments qui va de pair avec cette opération est forcément le respect des mesures, assuré par un suivi.
Répression « Je pense qu’au début les gens respectaient les mesures parce que l’État déployait les forces de sécurité pour que ce soit le cas. Les problèmes arrivent après, quand il y a un relâchement », explique Marius Comoé, Président de la Fédération des associations des consommateurs actifs de Côte d'Ivoire (FACACI). L’explication à cela, pour lui, c’est le coût du maintien de la force publique dans les rues. S’agissant des véhicules de transport en commun, qui ne respectent pas le nombre de passagers autorisés en cette période de pandémie, à l’entendre, il faudrait un déploiement plus conséquent des éléments des forces de l’ordre sur les voies. En même temps, la réalité des moyens dont dispose l’État constitue un frein. « En plus du suivi, il faut sévir. Par exemple, on ne peut valablement pas surveiller toutes les boîtes de nuits et bars à Abidjan, vu leur nombre et étendue. Dans ce cadre-là, c’est la sanction qui prime », note-t-il. Avant la crise sanitaire, le manque de suivi dans la prise des mesures s’était déjà illustré dans de nombreux domaines. « Il faut maintenir une atmosphère permanente de contrôle. Dès que les gens sentent qu’on lève le pied, il y a un laisser-aller qui s’installe », fait savoir Me Yacouba Doumbia, président du Mouvement ivoirien des droits humains (MIDH). Ce qui s’est illustré notamment pendant les opérations de déguerpissement des zones à risques en saison pluvieuse, lors de l’assainissement des axes routiers, au cours de la campagne de lutte contre les médicaments de la rue, dans la lutte contre les vendeurs ambulants. Parfois, le suivi d’une opération de sécurité ou d’assainissement peut s’avérer plus coûteux que l’opération elle-même. Comme l’a démontré le déguerpissement du boulevard Nangui Abrogoua. « Mais, sans suivi, on n’aboutit à rien », conclut M. Comoé.
Raphaël TANOH