2017 s’achève : Le calme avant la tempête en 2018 ?

Alassane Ouattara arrivera-t-il à tempérer les ardeurs au sein du RHDP

Crise ouverte entre alliés au pouvoir et au sommet de l’État, coups de feu dans les casernes et les corridors, front social en ébullition avec une longue grève des fonctionnaires, échecs de l’équipe nationale de foot, etc. L’année 2017, qui s’achève dans quelques jours, n’a pas été pauvre en évènements malheureux pour la Côte d’Ivoire. Mais 2017 c’est aussi l’organisation réussie des Jeux de la Francophonie, l’accueil de 83 chefs d’États, accompagnés de plus de 5 000 délégués, pour le sommet UA – UE, marquant le retour du pays sur l’échiquier international. Mouvementée dès ses premières heures, 2017 s’achève dans un climat plutôt calme et apaisé. Le calme avant la tempête ? Une chose est sûre, plusieurs contentieux qui ont cristallisé l’attention des Ivoiriens n’ont pas encore été vidés. Mieux, d’autres se sont greffés sur les principaux.

Dans une dizaine de jours, 2018 ouvrira ses portes à la Côte d’Ivoire. Nous tournerons ainsi les pages de 2017, pleines de soubresauts mais aussi de bonnes et belles choses. L’on pourra garder en mémoire une année qui a dansé au rythme de la volonté des forces politiques, qui se mesurent en attendant le grand rendez-vous de 2020, date emblématique pour la Côte d’Ivoire post crise. Défiance, arrangements et complots politiques, tout, ou presque, sera au rendez-vous. À quelques deux années de cette date, l’on  ne peut pas dire que la sérénité gagne  les cœurs des Ivoiriens, tant les  discours et les actes des politiques ne rassurent guère les populations, éternelles otages des hommes politiques. L’armée, qui avait ouvert les hostilités, est désormais tournée sur elle-même, avec plusieurs réformes annoncées, qui devrait aider à la rendre vraiment muette après deux décennies de présence sur l’espace politique.  Souhaitant une « plus grande confiance entre l’armée et les dirigeants », le ministre de la Défense, Ahmed Bakayoko, n’hésite pas à chacune de ses sorties d’inviter les hommes en uniforme à tourner dos « aux déstabilisateurs qui n’ont pas conscience que, quand les militaires sont fâchés, personne ne peut se mettre devant eux et tout le monde en souffre ».

Des duos et des duels Le ton a été donné en 2017 et n’est pas prêt de baisser.  L’arène politique semble plus tourner autour des duels que des débats fondamentaux de la démocratie. Dans sa volonté de conserver le pouvoir en 2020, le Rassemblement des Houphouëtistes pour la paix et la démocratie (RHDP), après plusieurs hésitations, tentera de désigner clairement la paire qui portera les couleurs en 2020. « Le duo Daniel Kablan Duncan et Amadou Gon Coulibaly se renforce de plus en plus, et le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), qui annoncera son candidat mi-2018, devra précipiter les choses au niveau de son allié, le RDR. Même si ces deux personnalités semble bien parties pour avoir l’aval des Présidents Ouattara et Bédié, sur le terrain elles auront fort à faire pour rallier le maximum de voix discordantes dans chacun de leur camp », confie un cadre du PDCI. C’est qu’au sein de ces deux  principaux partis du RHDP les ambitions ne manquent pas. Il faudra compter avec Guillaume Soro, Jean-Louis Billon et, à un degré moindre, Albert Mabri Toikeusse, de l’Union pour la démocratie et la paix (UDPCI). Ils espèrent faire valoir des arguments pour faire peser la balance vers leurs personnes, ou à tout le moins pour avoir des garanties solides concernant leur présence et leur maintien dans le jeu politique. Le duo Duncan – Gon,  qui avance à pas de loups, même s’il est un peu tôt pour lui attribuer des intentions, devra mettre les bouchées doubles s’il veut gagner les duels, d’abord en interne, face à ses concurrents potentiels. L’opposition, quant à elle, n’offre aucune lisibilité. L’année qui s’achève n’a pas permis à ses leaders de vider leurs contentieux et de dégager une option crédible pour 2020. Les deux camps restant face à face, les bonnes volontés n’ont pas encore fait bouger les choses d’un iota. «  Il n’y a presque pas d’avancée. Depuis 2015, c’est le statu quo et aucun des deux camps ne veut faire le premier pas », affirme Achile Gnaoré, Président des agoras et parlements et proche d’Aboudramane Sangaré, qui a maille à partir avec ceux de son camp depuis qu’il a entamé ses tournées afin d’appeler ses militants à imposer une « paix des braves » à leurs dirigeants. Autant Pascal Affi Nguessan se rase en songeant à 2020, autant Aboudramane Sangaré en fait autant en espérant briser le rêve du premier cité, tout en s’accrochant à une implication de Laurent Gbagbo depuis la Haye. Des duellistes que certaines bonnes volontés tentent de transformer en duo avant fin 2018, afin de bien préparer les échéances électorales de 2020. « On ne peut pas se permettre d’être absents pendant plus de 10 ans aux joutes électorales et espérer conserver son électorat. Ils devront trouver un terrain d’entente ou se voir imposer une issue pour la survie du Front populaire ivoirien (FPI) », tranche un cadre de ce parti proche de la médiation lancée par Abou Cissé, ex compagnon de Laurent Gbagbo.

Nouvelles alliances ? Rien n’est à écarter. « Le PDCI et le RDR évoluent comme s’ils étaient seuls sur l’espace politique et ne tiennent parfois pas compte  des aspirations et plaintes de leurs militants et de l’existence des autres forces. Ils risquent d’ouvrir la voie à de nouvelles alliances, qui pourraient leur faire mordre la poussière », pense un observateur politique. S’ils regardent de loin le RHDP et le FPI se « fragiliser » mutuellement, des leaders comme Mamadou Koulibaly et Gnamien Ngoran caressent en secret le désir d’un chamboulement qui leur permettrait de tisser des alliances solides et de leur donner plus d’arguments pour « bousculer des partis qui se battent depuis près de 20 ans »,  pense le politologue Julien Nguessan.  Toutefois, estime-t-il, il ne faut pas se leurrer « le changement des mentalités chez les militants n’est pas pour demain et les leaders politiques de l’opposition ne donnent pas de signes positifs pour apporter un changement radical, comme en témoigne leur division à la veille de l’élection d’octobre 2015 et leur silence durant toute l’année 2017. Ils ont laissé le gouvernement faire la pluie et le beau temps ». Mais, prévient-il, il n’est pas « trop tard » et l’opposition peut « se réveiller, en se mettant au-dessus des querelles de personnes pour mieux appréhender l’essentiel de son combat ».

Bouleversements à l’horizon ? Après les gouvernements Amadou Gon I,  en janvier,  en Amadou Gon II, en juillet, l’on devrait s’acheminer vers « un autre réaménagement technique, et si possible un remaniement, au premier trimestre 2018 », croit savoir un proche du Premier ministre. La nomination du ministre des Mines, Jean-Claude Brou, au poste de Président de la Commission de la CEDEAO, annonce déjà les couleurs. Si certains observateurs ne s’attendent pas à de grands changements, ils prédisent que le noyau dur avec lequel évolue le Président Ouattara depuis 2011 devrait être maintenu.   Mais, « avec la configuration politique actuelle, où l’on tente de satisfaire tous les acteurs-clés et de faire moins de frustrés dans les rangs, l’on pourrait voir de nouvelles nominations intervenir au sein du gouvernement », confie sous cape un membre influent d’un cabinet ministériel. Dans les coulisses, certaines langues avancent également la probabilité d’un changement à la tête de plusieurs Établissements publics nationaux (EPN). « En 2017, des dispositions ont été prises pour limiter à 6 ans le mandat des Président des Conseils d’Administration des EPN. Une telle mesure pourrait également être envisagée pour les Directeurs généraux », confie la même  source. Comme début 2017, l’on pourrait assister au premier trimestre 2018 à une symphonie de chaises musicales, qui devrait à coup sûr faire des heureux, mais aussi des revanchards.

Ouakaltio Ouattara

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