Lutte contre la vie chère : un pari difficile à tenir

La non maitrise des prix sur les marchés ivoiriens est un casse-tête pour les gouvernants

La mesure n’est pas véritablement nouvelle. Déjà en décembre 2012, sur proposition du ministère du Commerce, le gouvernement arrêtait en 11 points sa politique de lutte contre la vie chère. La volonté politique d’alors s’était traduite par des actions d’éclat, à travers la destruction de barrages routiers anarchiques et une opération de contrôle de prix médiatisée. Puis, plus rien. Cinq ans après, le gouvernement vient de décider de la mise en mise en place d’une nouvelle politique de lutte contre la vie chère. Aveux d’échec des initiatives précédentes ou renforcement de la politique de 2012 ? La question dénote de la difficulté du pari.

Augmentation des salaires des fonctionnaires et du SMIG, et lutte contre le racket sur le réseau routier par le démantèlement de barrages anarchiques, sont autant de mesures prises par le gouvernement en décembre 2012 afin d’impacter positivement les prix des denrées alimentaires et le pouvoir d’achat des Ivoiriens. Saluées à l’époque, ces mesures n’ont pas pour autant réussi à inverser la courbe des prix en faveur des populations. Certains vont même plus loin, en affirmant que comparativement à 2012, les prix se sont envolés et le pouvoir d’achat des Ivoiriens, en général, a stagné.

À travers la mise en place d’un Conseil national de lutte contre la vie chère (CNLVC), annoncée le 21 juin, le gouvernement veut aller cette fois plus loin. Avec pour mission de « lutter plus efficacement contre les facteurs et pratiques qui favorisent la hausse des prix des denrées alimentaires, du transport ainsi que du logement », précisait le porte-parole du gouvernement, le ministre Bruno Nabagné Koné. Sous l’autorité du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, ce conseil aura également pour mission de coordonner les stratégies de lutte contre la vie chère définies par les autorités, et d’assurer le suivi de la mise en œuvre. En vue de renforcer les mesures précédentes, compte tenu d’une nouvelle flambée des prix, le gouvernement indique avoir identifié de nouvelles mesures en vue « de renforcer les mesures en cours et lutter de façon efficace, vigoureuse et visible contre la vie chère. » 

Agir sur les leviers Les indicateurs de la vie chère sont composés de trois éléments essentiels, à savoir les prix des denrées alimentaires, le coût du transport et celui du logement. Sur les deux premiers points, si on note une forte baisse des barrages routiers favorisant le racket, les organisations de consommateurs estiment qu’il faut aller encore plus loin en renforçant le dispositif sécuritaire certes, mais en prenant d’autres mesures visant à durcir les lois contre le racket organisé. « Il faut une stratégie nationale afin de mettre définitivement fin à les pratiques peu orthodoxes de certains agents des forces de l’ordre sur nos routes », propose en substance le Mouvement des consommateurs actifs (MCA-CI) de Pacôme Brice Adjé. La volonté politique a pourtant toujours été affichée, mais le terrain commande souvent bien d’autres choses. Accusées, certaines forces de l’ordre se défendent en indiquant que dans le secteur du transport des marchandises, nombreux sont les véhicules qui ne disposeraient pas de pièces complètes. « Bloquez un camion de denrées périssables, et vous mettez en difficulté le propriétaire de la marchandise de même que la marchandise. Les transporteurs ne facilitent pas les choses et sont eux-même les premiers responsables des rackets », nous confie un gendarme du peloton mobile de Soubré. Au niveau du transport des personnes, le gouvernement s’est toujours défendu d’avoir fait de gros efforts en profitant de la chute des cours du baril de pétrole pour revoir à la baisse les prix du carburant à la pompe. « Mais les transporteurs n’ont pas suivi », lançait le ministre du Commerce de l’époque, Jean Louis Billon. Les appels de son collègue ministre des Transports n’avaient rien changé à la donne. « Augmentez le carburant d’un centime, les transporteurs augmenteront le prix du transport. Faites des baisses sur le coût du carburant, ils ne suivront pas », lance presqu’impuissant un fonctionnaire du ministère. On se souvient à ce propos que plusieurs rencontres entre la tutelle et les transporteurs s'étaient soldées par un accord sur une baisse des prix à la fin 2015. Après quelques actions d’éclat médiatisées, les choses n’ont pas changé d’un iota. 

Autre levier de la cherté de la vie, la politique des logements sociaux. Elle tarde malheureusement à donner des résultats. Selon Jean Amani Brou, du département études des transports et infrastructures au Bureau national d’études techniques et développement (BNETD), le besoin en logement à Abidjan enregistre un déficit de 500 000 maisons. Selon ce dernier, pour freiner la flambée des prix à ce niveau, « il faudra arriver à désengorger Abidjan et à assouplir les conditions d’accès aux logements sociaux. » Mais dans un système libéral tel qu’appliqué en Côte d’Ivoire, les Ivoiriens n’ont pas d’autres choix que de subir le diktat des propriétaires de maisons. Autre difficulté, la loi votée en 2013 en vue de réguler le secteur, et qui limitait la caution à trois mois de loyer, n’a jamais connu un début d’application et aucune disposition pratique n’a été prise pour contraindre les propriétaires immobiliers à l’appliquer.

Mesures de veille Le gouvernement ne s’avoue pas pour autant vaincu. S’appuyant sur plusieurs mesures prises, il compte désormais veiller à leur mise en œuvre effective. Est-ce réalisable ? « Si on supprime les lourdeurs administratives et traitons sans complaisance le problème à la racine, le gouvernement pourra se féliciter d’avoir réussi à impacter positivement le coût de la vie », soutient Marius Comoé, président de la Fédération des consommateurs actifs de Côte d’Ivoire. Dans ces attributions, le Conseil national de lutte contre la vie chère, en plus d’être un instrument de veille, est aussi une force de proposition pour le gouvernement et une interface entre celui-ci et les organisations de consommateurs. Selon un fonctionnaire du ministère du Commerce, la mise en place de ce comité est le fruit d’une longue réflexion, qui « a tenu compte de la volonté politique affichée par les autorités, des réalités sur le terrain et des propositions des associations de consommateurs. » Il devrait pourvoir travailler efficacement et donner des résultats probant d’ici peu. « Mais les décisions finales appartiendront au gouvernement », prévient-il. 

Le poids de l’importation Dans le cadre de sa politique, le gouvernement devra tenir compte du poids des produits de grande consommation importés. Pour un besoin en riz estimé à un peu plus de 1 200 tonnes par an, la Côte d’Ivoire n’en produit qu’environ 600. Or, ce produit enregistre des hausses de prix significatives sur le marché mondial, liées notamment aux inondations en Thaïlande, (1er  producteur mondial de riz  semi-luxe et de luxe) et à la mise en œuvre de l’engagement de ce pays à payer aux producteurs des prix  élevés déconnectés du marché mondial. En 2012, la Côte d’Ivoire s’était pourtant engagée à négocier des prix préférentiels avec les États producteurs de riz, appliqués à des opérateurs nationaux. Malheureusement, le pays a été confronté sur ses propres terres, à une insuffisance de la production du riz local, doublé de difficultés d’accès à certaines zones de grande production et à l’insuffisance des moyens de transport des produits vivriers, entraînant des retards dans l’approvisionnement des marchés et la hausse des coûts du transport, avec pour conséquence une hausse des prix.

Dans un pays qui continue d’importer en grande partie des produits de grande consommation, tels que la viande et le bétail depuis le Mali (environ 70%), et le poisson depuis la Chine (la production nationale est estimée à 50 000 tonnes contre une consommation de 400 000 tonnes), beaucoup d’efforts restent à faire, d’autant que la production locale des produits vivriers reste soumise aux aléas climatiques et à l’absence grandissante de main d’œuvre agricole. Il faut ajouter à cela l’omerta des industriels sur les produits manufacturés et l’absence d’une véritable concurrence entre eux. En réactivant la Commission de la concurrence rebaptisée par le Président de la République « Commission de la concurrence et de lutte contre la vie chère », adoptée en début juin par les parlementaires, l’espoir reste toutefois permis.

Ouakaltio OUATTARA

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