D’aussi loin que les Ivoiriens s’en souviennent, leur très chère capitale économique a été au début de toutes les crises dans le pays. Le lieu où l’on a fomenté des coups fumants, orchestré des plans machiavéliques, perpétré des actes aux conséquences tragiques. Abidjan est-elle la ville qui dégrade les notes de la Côte d’Ivoire dans le classement des pays pacifiques ? Tout porte à le croire.
C’est Abidjan qui donne le ton. Quand elle siffle, toutes les autres villes se mettent au pas. C’est dans la capitale économique ivoirienne que les choses sérieuses se passent. La mauvaise élève du pays en termes de tranquillité est réputée pour semer le trouble. On le savait déjà, la Capitale des lagunes était citée comme le lieu où l’on dénombrait le plus de braquages. Mais, lors de son séminaire bilan à Yamoussoukro, la police nationale a aussi relevé qu’Abidjan est la cité où il y a eu le plus de vols de véhicules ces derniers mois. Ce ne sont que des données concernant la criminalité, mais elles font partie des indicateurs pour le calcul de l’indice de paix mondial.
Menaces Épargnée pour l’instant par les conflits entre communautés, qui relèvent le plus souvent de désinformations et de manipulations, la ville s’est cependant spécialisée dans les actes sournois. Pendant la période de la désobéissance civile, c’est la capitale économique qui a enregistré le plus d’incidents, avec un grand nombre de bus et de mini cars (véhicules de transport en commun) brûlés. Des individus les attaquaient et disparaissaient comme des Ninjas. Les affres de la crise post électorale de 2010 sont encore dans les mémoires. « On constate qu’à chaque fois qu’il y a des troubles annoncés ou des menaces, les populations quittent massivement la capitale pour les villes de l’intérieur, afin de retrouver la tranquillité », explique Bruno Douampieu, responsable de l’ONG Paix et espoir pour tous, qui œuvre pour la sensibilisation contre les conflits en période électorale. Pour lui, toutes les grandes capitales ont la fâcheuse tendance d’être au centre des troubles. « Toutes les crises que nous avons connues en Côte d’Ivoire ont pris racine dans la capitale. Cela s’explique par le fait que c’est là que se trouvent les institutions de la République, le pouvoir », explique-t-il. Quand Abidjan marche, tout le reste du pays marche. Toutefois, l’ouest du pays a enregistré et continue d’enregistrer des troubles, d’après M. Douampieu. « L’ouest a aussi contribué à ternir l’image de la Côte d’Ivoire, à cause des conflits entre communautés. Quand Abidjan est calme, il faut aussi que l’ouest le soit pour que le pays soit en paix ».
Raphaël TANOH