L’engouement affiché par les mairies les années précédentes dans le déguerpissement des zones à risques a freiné des quatre roues en 2020. Si le coronavirus a quelque peu occulté le volet, le retour de la saison des pluies remet la question sur la table. Point récurrent : les zones à déguerpir sont très curieusement les mêmes chaque année.
Opération « Pays propre », « Opération ville propre », « Grand Ménage », etc. Depuis plusieurs années les Ivoiriens ont vu quartiers, baraques, boxes être démolis les uns après les autres. Le plus souvent, les déguerpis ont été dociles, mais, parfois, il a fallu user de la force, de gaz lacrymogènes et même de tirs de sommation. À la fin de chaque opération, hélas, le même problème s’est posé : la recolonisation des sites, si bien que les énumérer après le passage des bulldozers, revient à égrener un long chapelet. Pour Gaoussou Gabo, impliqué dans le maintien de l’ordre à Mossikro, tout part d’un bon programme. « Si vous chassez les gens et qu’ils n’ont nulle part où aller, ils vont revenir s’installer. Il faut leur proposer une alternative. Soit de l’argent ou bien un terrain où ils pourront repartir à zéro », explique le chargé de communication de la chefferie de Mossikro, qui travaille d’arrache-pied avec la mairie d’Attécoubé afin d’éviter que les zones à risques déguerpies dans son quartier soient recolonisées.
Programmes Dans les programmes qui suivent le déguerpissement, d’après lui, le suivi est très important. Jusque-là, très peu de municipalité l’ont réussi. Chaque année a son lot d’inondations ou d’éboulements de terrain. Des quartiers les plus chics ou luxueux au plus pauvres, nul n’est à l’abri. Les mairies, débordées et sans moyens, tournent les yeux vers les ministères, espérant que chaque année soit meilleure que la précédente. Hélas, quand une zone est traitée, il faut s’attendre à ce que les dégâts se signalent ailleurs. Et la ville d’Abidjan ne fait que grandir et augmenter sa population. Cette forte démographie, en plus d’impacter négativement l’environnement, exerce une pression quotidienne sur les bassins d’orages. Les incessantes invitations à les libérer semblent tomber dans des oreilles de sourds. « Ce n’est pas de gaité de cœur que les opérations de déguerpissement sont menées. Mais parfois il faut faire le bonheur de certaines personnes contre leur gré », aime-t-on dire au ministère de l’Assainissement. Mais, malgré ces multiples opérations, les saisons des pluies sont toujours un véritable casse-tête pour les autorités et une angoisse perpétuelle pour certaines populations. L’équation s’avère ainsi difficile à résoudre à chaque niveau et les solutions pour mettre fin à ce cycle infernal sont un énorme chantier.
Raphaël TANOH