Salles de classes peu équipées, enseignants parfois mal formés… Curricula scolaires inadaptés aux besoins du marché du travail. Eh oui, le rapport 2017 de la Banque mondiale sur l’école ivoirienne étrille au passage nos programmes d’enseignement supérieur.
Plus de 80 000 bacheliers ont été recensés en 2017 et près de 100 000 cette année. Environ 75% seront orientés vers les grandes écoles et le reste dans les universités publiques, déjà saturées. Mais qu’offre-ton à ces futurs chercheurs d’emplois en termes de formation? C’est là que le bât blesse.
Inadéquation Si dans les grandes écoles on a pris les devants avec les réformes menées par l’État depuis 2012 et l’adaptation de certaines filières, dans les universités publiques, l’inadéquation formation / emploi n’a jamais été aussi évidente. « En criminologie tout comme en science - économie, où les étudiants sont les plus nombreux, sur les milliers qui arrêtent leur formation chaque année, à peine une centaine arrive à trouver un emploi », explique Jean Roland Apalo, Secrétaire général de la Fédération des élèves et étudiants pour le renouveau (FEDER). Ces diplômés sont contraints de passer les concours d’entrée à la Fonction publique, avec très souvent leur seul baccalauréat, regrette l’étudiant. « Pourquoi continuer d’orienter des milliers de bacheliers vers certaines facultés si l’on n’en a pas réellement besoin ? Ils sont obligés de se reconvertir s’ils veulent avoir du travail ». À quoi auront servi ces années ? La Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) connaît bien ce problème. « Nous ne demandons pas de supprimer des UFR. Mais plutôt d’affecter les nouveaux bacheliers selon les besoins », propose Silver Kouamé, Secrétaire à la communication. Parmi les dizaines de milliers de diplômés qui quittent les universités publiques, nombreux sont ceux qui se tournent vers l’enseignement privé. « Si nous voulons atteindre l’émergence, il faut se demander quel type d’Ivoirien nous voulons », s’interroge Alhouceine Sylla, Président de l’Association des professionnels des ressources humaines de Côte d’Ivoire (APRHCI). Eux qui reçoivent les dossiers de demande d’emploi ont vite compris que les diplômes ne servaient presque plus à rien. « Il faut orienter les bacheliers vers les filières utiles pour le pays », les technologies de l’information et de la communication, les ressources humaines, etc. La compétitivité des entreprises est une préoccupation majeure pour le Patronat. « Il n’y a pas d’adéquation entre nos besoins et les diplômes », affirmait récemment le Directeur exécutif de la Confédération générale des entreprises de Côte d'Ivoire (CGECI), Vaflahi Méïté. « Le problème, c’est où mettre tous ces étudiants en dehors des filières science - éco ou criminologie ? Dire que ces facultés ne sont pas utiles est faux. La question de l’emploi se pose de façon globale, elle n’est pas liée à l’université », soutient un proche du Professeur Abou Karamoko, Président de l’université Félix Houphouët Boigny.
Raphaël TANOH