Élections locales : C’est parti !

Le vendredi 28 septembre, le top départ sera donné pour la campagne des élections locales, municipales et régionales couplées. 689 candidats auront deux semaines pour convaincre les électeurs afin que ces derniers leur affirment ou leur réaffirment leur confiance le 13 octobre. Pour la première fois depuis 2011, le RHDP et le PDCI s’affronteront directement, sous les regards du FPI et des indépendants, qui espèrent profiter de leur rupture pour rafler la mise. Lors des élections municipales de 2013 et des législatives de 2016, plusieurs d’entre eux avaient gagné ce pari. La bataille électorale s’annonce rude et la campagne a commencé avant l’heure.

Tout est fin prêt au niveau de la Commission électorale indépendante (CEI). Liste électorale remise aux candidats, mode opératoire du scrutin publié, répertoires et lieux de vote mis à la disposition du grand public. Côté sécurité, les forces de l’ordre (militaires, gendarmes et policiers) sont mobilisées comme d’habitude afin que le scrutin se déroule dans de bonnes conditions. Le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) a investi officiellement et en grande pompe, le 24 septembre, ses 204 candidats à ces élections. Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et le Front populaire ivoirien (FPI) ont préféré conserver leurs forces pour le terrain. Ainsi, côté candidats, on se démène comme on peut pour obtenir soit une lettre d’investiture, soit des partenaires et des soutiens. Après avoir parcouru villes et villages pour faire connaitre leurs ambitions pour les communes et les régions, le vendredi 28 septembre le top départ officiel leur sera donné pour achever de convaincre les électeurs. Deux semaines devront suffire à ces 686 candidats, à l’assaut de 201 communes et de 31 régions, pour se maintenir dans leur fauteuil ou évincer les sortants. Tout en jouant leur carte politique au niveau local, la plupart de ces candidats portent les espoirs de leurs dirigeants pour l’élection présidentielle 2020. Les enjeux vont ainsi au-delà des scrutins locaux et chacun y va avec ses armes et ses moyens.

Arguments contre arguments Les Ivoiriens sont désormais des habitués de l’exercice électoral. En moins de 10 ans, ils participent à leur sixième compétition électorale, tous scrutins confondus. Des candidats en tous genres, ils en ont vu, et après les votes purement politiques, parfois guidés par des liens familiaux ou religieux, les choix se portent de plus en plus vers la capacité des candidats à apporter le développement au plan local. Toutes les communes ivoiriennes connaissent presque les mêmes problèmes. Il s’agit entre autres des voies d’accès peu ou non praticables, du manque d’eau et d’électricité, de la célérité dans  la délivrance des actes administratifs, de l’accès aux soins de santé de base. Voici les projets sur lesquels les électeurs attendent les candidats. « Les électeurs savent désormais faire la différence entre un discours démagogue et un discours réaliste. Ils savent ce qui est du ressort des conseillers municipaux et ce qui ne l’est pas. Il va falloir polir le langage et avoir un projet bien structuré avant de les aborder », prévient un maire sortant qui a décidé de ne pas rempiler. « Les maires sortants sont le plus en danger. Ils ont déjà été vus à l’œuvre. Leur bilan joue pour ou contre eux. En face, les électeurs ont de nouveaux visages, qu’ils veulent expérimenter » poursuit-il. Mais, prévient Firmin Kouakou, politologue, le contexte politique « influencera le choix des électeurs. Ces élections se transformeront en une mini-élection présidentielle et il n’est pas à écarter que les électeurs fassent par endroits des choix guidés par leur appartenance politique. Cela pourrait conduire ces derniers à rester sourds aux programmes qui leur seront proposés, même les plus alléchants, réalistes et réalisables » soutient-il.

L’argent fait-il la différence ?  Les candidats n’y échapperont pas. Ils devront mettre la main à la poche s’ils veulent s’assurer une victoire. Certains l’ont déjà compris et y sont allé avec des mains très généreuses lors de la pré campagne. Tout seuls, un programme, même le plus alléchant, et les discours, mêmes les plus flatteurs et démagogiques, ne suffiront pas à assurer la victoire. Ceux qui sont intéressés par les postes de maires ou de présidents de conseil régional devront mettre investir pour séduire chacun des électeurs. Aucune voix n’étant à négliger, il va s’en dire que ce ne sera pas une mince affaire pour les candidats qui n’ont pas un gros budget. Encore moins pour ceux qui, lors des opérations de révision de la liste électorale, avaient déplacé des électeurs pour se construire une base électorale. « Plus le candidat fait preuve de largesse ou dépense sans retenue, plus il augmente ses chances d’être élu. J’en ai fait l’amère expérience il y a cinq ans. J’en suis sorti endetté, car même avec les dépenses vous n’êtes pas toujours assuré de gagner », témoigne un candidat malheureux aux élections municipales de 2013. Selon ce dernier, il faut prévoir pour les deux semaines de campagne au bas mot 35 millions de francs CFA pour les moins nantis, là où d’autres candidats arrivent avec des centaines de millions. « Les élections, ça coûte cher. En plus d’une préparation des actions de générosité qu’un candidat peut faire sur plus de deux ans, il doit dépenser plus à l’approche du scrutin et encore plus dans la période de campagne », poursuit-il. Une réalité qui n’est pas du goût du politologue Firmin Kouakou. « D’où tirent-ils tant d’argent ? N’est-ce pas cela qui favorise les détournements de deniers publics une fois qu’on est élu ? », s’interroge-t-il, avant d’ajouter « c’est un investissement, il va bien falloir que quelqu’un paye la note ». Le niveau de pauvreté dans les différentes localités est tel que les candidats se sentent pourtant obligés de prêter une oreille attentive aux sollicitations, aux cas sociaux et autres. La question de l’origine des fonds de campagne, sujet presque tabou, se pose pourtant de plus en plus. Si, pour la plupart, les principaux partis politiques reçoivent des financements de l’État, c’est bien rarement que cet appui est utilisé pour les campagnes électorales, surtout locales. « Lors des dernières élections municipales, l’appui du Rassemblement des républicains (RDR) aux candidats de l’intérieur tournait entre cinq et dix millions de francs CFA pour les communes et les régions », confie un élu de ce parti. Selon lui, cela ne constitue même pas le tiers du budget de campagne. Un cadre du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) ne dit pas le contraire. Il estime que cette aide des partis est « si infirme que certains candidats hésitent à la prendre ».  Moins chanceux, les indépendants n’ont d’autre choix que de compter sur leurs propres ressources et de l’aide de certains proches, qui ne vient pas toujours, ou encore espérer avoir des prêts.

Opportunités « La communication (affiches, impression de tee-shirts, présence dans les médias), les dons de diverses natures aux populations et la logistique engloutissent tout cet argent », déplore ce cadre du PDCI, alors que les prestataires de services se frottent les mains. « Il faut confectionner suffisamment de tee-shirts, il faut prévoir des panneaux publicitaires. Il faut aussi offrir à manger aux populations et au staff de campagne, sans compter les dépenses vestimentaires du candidat, qui ne doit pas toujours se présenter en tee-shirt à ses meetings. Il faut aussi songer à ses représentants le jour du scrutin dans les bureaux de vote », explique un prestataire de service, qui y voit une opportunité pour plusieurs petites entreprises exclues auparavant de certains gros marchés. Ce dernier évalue la confection de tee-shirts à 1 000 francs CFA l’unité, la location journalière d’un 4x4  à 45 000 francs et celle d’un panneau de 12m²  à 300 000 francs par jour.  « En somme, c’est aussi une période de campagne pour plusieurs petites entreprises », se réjouit-il.

Ouakaltio OUATTARA

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