Élu en février 2016 pour un second mandat de quatre ans, Augustin Sidy Diallo est à quelque mois de sa fin. Six, pour être précis. Rien dans les textes de la Fédération ivoirienne de football (FIF) ne l’empêche de concourir pour un troisième mandat. Mais il ne se confie qu’à son cercle restreint et entretient le flou sur sa volonté : un troisième round ou l’ouverture de sa succession ? Cela n’empêche pas les candidatures, et non des moindres. Didier Drogba, Malick Tohé, Sory Diabaté seraient bien intéressés à lui succéder. Des atouts et des réseaux, chacun en a. Iront-ils jusqu’au bout de leurs ambitions ? En attendant l’ouverture de la période de dépôt des candidatures, chacun fait son lobbying, discrètement ou ouvertement, et tente de rallier à sa cause le plus grand nombre de clubs.
Le second mandat de quatre ans du président de la Fédération ivoirienne de Football (FIF), Augustin Sidy Diallo, prendra fin dans moins de six mois. À la tête de la FIF depuis 2011, ce dernier, avare en paroles, garde encore secrètes ses ambitions. Du moins officiellement. Rien dans les textes de la FIF ne l’empêche de briguer un troisième mandat. Secoué par la question des primes impayées des footballeurs lors de la CAN 2015 et par un groupement de club (GX) demandant son départ, Augustin Sidy Diallo brandit plutôt les avancées obtenues par la FIF sous ses deux mandats. Notamment le financement des clubs et surtout une CAN, la seconde, pour la Côte d’Ivoire obtenue en 2015. Si certains de ces proches confient que Sidy Diallo ne sera pas candidat, d’autres préfèrent jouer la carte de la prudence. Mais ses potentiels adversaires ou candidats à sa succession n’attendent pas tous. À six mois des élections, l’ex international ivoirien Didier Drogba devenu collaborateur du président de la Confédération Africaine de football (CAF) ne cache pas ses intentions. « C’est sûr que ce serait important. Si toutes les conditions sont réunies et que tout le monde adhère au projet, ça peut être intéressant », lâche-t-il. Mais Drogba n’est pas le seul à lorgner le fauteuil de la FIF. S’il n’est pas candidat, Sidy Diallo pourrait pousser et même soutenir la candidature de Sory Diabaté, son 1er Vice-président et Président de la Ligue de football professionnel. Ce dernier est présenté comme le « patron » actuel de la FIF. Il connait bien la maison, y est depuis plus de 15 ans et en connait les rouages dans les moindres détails. À ces deux potentiels candidats, l’on peut ajouter Malick Tohé. Un autre vieux de la vieelle. Ancien numéro trois de Sidy Diallo, il a fait ses armes sous celui que l’on peut considérer comme le père du football moderne de Côte d’Ivoire, Jacques Anouma. Tout en prenant ses distances avec Sidy Diallo il a gardé des contacts avec les clubs de football et pense, selon des proches, pouvoir tenter sa chance.
Jamais deux sans trois ? « Il m’a confirmé ne pas être intéressé par un autre mandat à la tête de la FIF », lance l’un de ses proches. Mais sa présence le samedi 10 août auprès du Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, à Toumodi et dans l’après-midi auprès du ministre d’État Hamed Bakayoko à Bayota n’est pas passée inaperçu. Il est certes proche de ces deux hautes personnalités, mais certaines sources dévoilent qu’il serait en quête de soutiens. Pour lui-même ou pour un autre candidat ? Silence radio. Acculé par le GX et les contre-performances de l’équipe nationale de football, il avait su avec le temps desserrer l’étau autour de lui. « La dernière assemblée générale, tenue au mois de juin dernier, démontre qu’il est capable de renverser des situations en sa faveur et qu’il a encore le soutien de plusieurs clubs. Cela n’est pas à négliger », explique un proche cité plus haut.
Forces et faiblesses Ils sont tous de gros calibres et des prétendants sérieux pour l’avenir du football ivoirien. Tant au sein des clubs ivoiriens qu’au niveau des instances africaines de football, ils ont de gros soutiens. Obtenir le parrainage d’au moins huit membres actifs de la FIF, à savoir trois clubs évoluant en D1, deux évoluant en D2 et deux en D3 et d’un groupement d’intérêt du football, comme le stipule l’article 41 des statuts de la FIF, ne devrait pas poser de problèmes à ces hommes. En cas de désistement de Sidy Diallo, Sory Diabaté devrait être présenté comme le candidat du comité exécutif sortant. Il pourra s’appuyer sur le bilan de Diallo, son expérience personnelle et ses réseaux au sein des clubs ivoiriens. Pressenti déjà en 2011 comme le successeur naturel de Jacques Anouma, il est, selon des sources à la FIF, celui-là même qui maitrise le mieux la gestion de fédération. Mais Sory Diabaté n’a pas que des amis. La gestion du comité exécutif actuel n’a pas fait que des heureux. Le GX, ce groupement de plusieurs clubs (plus de 40 selon ses animateurs) le considère comme responsable de la mauvaise gouvernance de Sidy Diallo. « Il a su se mettre à dos des personnes comme celui qui était presqu’un parrain pour lui, Jacques Anouma. Il s’est brouillé avec Roger Ouégnin, Salf Bictogo, Abdoulaye Koné, Cévérin Yoboua, Yssouf Diabaté, Alain Gouamené, Malick Tohé, Hervé Siaba, etc., ça fait un peu trop », explique un observateur du football ivoirien. Son challengeur principal, qui pourrait s’appeler Didier Drogba, a l’avantage d’avoir été une icône du football ivoirien et d’être adulé dans le monde sportif et même au-delà. Il est vu comme un homme nouveau pour la gestion du football ivoirien et cela peut constituer à la fois un avantage et un inconvénient. Avantage pour apporter une touche nouvelle, du sang neuf. Mais aussi inconvénient, car ses adversaires pourraient sortir l’argument de sa non maitrise de l’environnement de la FIF. « Être au plus haut niveau du football ivoirien et diriger la FIF sont deux choses différentes. Le talent sur un stade n’est pas forcement répliqué dans la gestion d’une fédération de football », avance un membre de la FIF. Sa candidature pourrait paraitre comme un cheveu sur la soupe auprès de certains clubs de football, notamment ceux du GX, qui pourraient pencher vers Malick Tohé, l’un de leurs principaux financiers et leaders. Membre de la Commission du football jeunes de la CAF, Malick est également un fin connaisseur du football national et surtout des clubs et de leurs préoccupations. Mais, dans son entourage, l’on craint qu’une candidature de Didier Drogba ne lui fasse ombrage et ne réduise ses chances.
Hésitations Mais ces candidats ne sont pas les seuls à vouloir se lancer dans la course. Il n’a certes pas enterré ses ambitions de diriger le football continental, mais le retour de Jacques Anouma est souhaité par certains clubs. « Il est le père du renouveau ou de la renaissance du football ivoirien. De 2003 à 2011, il a su bâtir une équipe nationale compétitive. Il soutenait que si le football ivoirien voulait se développer, il lui fallait une présence continue en Coupe du monde. Et, depuis 2006 que la Côte d’Ivoire participe au Mondial, cela a permis de doter le stade Champroux et le Parc des Sports de pelouses synthétiques et d'accompagner de façon substantielle les clubs au niveau des finances », explique un ancien employé du ministère des Sports. À défaut d’être candidat, il pourrait apporter son soutien à un postulant sur lequel il pourra s’appuyer pour poursuivre son rêve de diriger la CAF. Hésitant également, Salif Bictogo, écarté de la course en 2016, a pris de l’assurance au sein du GX. Ses ambitions, il ne les cache pas. Mais après deux tentatives ratées (2011 et 2016), il y a de quoi hésiter à se lancer de nouveau, d’autant que cette fois-ci les appétits sont multiples.
Ouakaltio OUATTARA