L’introduction du permis à points est un système qui doit tenir compte non seulement de la capacité des pays à le faire appliquer mais aussi de la mentalité des populations
Instauré en France seulement en 2012, le permis à points reste jusque-là l’affaire des Européens. En Afrique, le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont pour l’instant les deux seuls pays à s’y intéresser. Si la Côte d’Ivoire est sur le point de l’appliquer, le Sénégal vient à peine d’adopter cette loi à l’Assemblée Nationale. Et sa mise en application est pour l’instant soumise aux humeurs des acteurs du transport sénégalais. Pourquoi tant de réserves au sujet de ce document, pourtant rigoureux pour lutter contre les accidents de la circulation en Afrique ? À cause de la polémique qu’il crée dans les pays qui l’utilisent déjà. Par exemple, après près de dix ans, le permis à points n’a toujours pas conquis le cœur de certains Français, poussant même des candidats aux élections à promettre son retrait. L’autre fait qui suscite la réticence des pays africains, ce sont les infrastructures inhérentes à la mise en œuvre du permis à points, mais surtout la gestion des infractions.
Annulations En 2021, 74 902 permis ont été invalidés en France pour défaut de points. Parmi eux, 1 403 personnes pour la seule infraction de conduite en état d’ivresse ou d’alcoolémie (6 points), 760 personnes au seul motif de la conduite malgré l’usage de stupéfiants (6 points), 947 personnes pour le seul motif du non-respect du stop ou d’un feu rouge (4 points) et 129 personnes pour le seul motif d’excès de vitesse d’au moins 50 km/h (6 points). Au vu de ces chiffres, pour Adama Yéo, transporteur et Porte-parole du Groupement des Chauffeurs, les autorités ivoiriennes peuvent s’attendre à se retrouver avec sous la main un bon nombre de cas d’infractions entraînant l’annulation du permis de conduire. Il faudra donc trouver les moyens de gérer ces situations, sachant que certains acteurs ne peuvent demeurer longtemps sans permis. De plus, la question de la moralité du permis à points a également été soulevée par une partie de l’opinion française. Preuve qu’elle n’est pas toujours la solution contre l’incivisme. Une partie de l’Europe, l’Italie et l’Espagne notamment, proposent un système de bonus pour les conducteurs qui n’ont pas commis d’infractions. En Espagne, le capital point maximum peut être de 15 au lieu de 12. En Italie, il peut être de 30 au lieu de 20. De nombreux pays du continent ont adopté un permis « zéro point ».
Raphaël TANOH