La cyberfraude a coûté près de 26 milliards à la Côte d'Ivoire, selon les derniers chiffres officiels. Un montant record, dû à l’activité sans cesse grandissante des cybercriminels. Leurs victimes ? Des gens gagnés par l’appât du gain facile.
Surnommée la reine des pays africains francophones de l’arnaque sur Internet, la Côte d’Ivoire semble toujours tenir à cette triste réputation. Le détournement d’argent depuis des portefeuilles électroniques ne cesse de monter en puissance. L’arnaque au chat (conversation en ligne) gagne aussi du terrain et les auteurs peaufinent au fil des ans leurs stratégies. Une pratique devenue si courante qu’elle attire de plus en plus de nouveaux adeptes.
Tourbillon D’après la Banque mondiale, la Côte d’Ivoire comptait plus de 10 millions d’internautes en 2019, contre à peine 200 000 en 2012. Si le système de placement d’argent a mis à nu la naïveté de certains Ivoiriens, avec les escroqueries sur le Web, c’est plutôt la créativité des « brouteurs » pour plumer les pigeons qui est à souligner. « Ce ne sont pas les campagnes de sensibilisation qui manquent pour prévenir les gens, mais ils se font toujours avoir », regrette Dr Séraphin Yao Prao, Professeur d’économie et Maître de conférences agrégé des universités. 98% des victimes des arnaques au portefeuille sont ivoiriennes, selon l'Autorité de régulation des télécommunications de Côte d'Ivoire (ARTCI). Et la traque se durcit. En 2018, 89 brouteurs ont été interpellés après 2 860 plaintes, et 73 déférés devant la justice pour escroquerie sur le Net », selon les chiffres de la Plateforme de lutte contre la cybercriminalité (PLCC) de la police nationale. La cyberfraude a également causé un préjudice de 5,5 milliards de francs CFA la même année, avec 98% des victimes résidant en Côte d'Ivoire. Mais pas que. Autant des établissements financiers en sont victimes, autant des Européens tombent dans le piège de ces arnaqueurs et son font escroquer. 339 comptes ont été supprimés ou récupérés, selon l'ARTCI. « La Côte d'Ivoire a mis en place des outils de lutte contre la cybercriminalité, dans le cadre d'une collaboration étroite entre l'ARTCI et la police nationale, qui donnent depuis plus de huit ans des résultats encourageants », se réjouit Marius Comoé, Président du Conseil national des organisations de consommateurs de Côte d'Ivoire (CNOC–CI). Mais beaucoup reste encore à faire. Car, chaque année, les arnaqueurs du Web ciblent des milliards de francs CFA. Les enquêtes sont parfois longues et les victimes abandonnent parfois la procédure. « Mais il y a aussi la honte de s’être fait prendre dans un tel piège qui pousse des victimes à ne pas porter plainte », explique un officier de la PLCC.
Raphaël TANOH