Elections locales 2023 : jeu et enjeux d’un scrutin crucial

Les élections locales (municipales et régionales couplées) se tiendront, sauf changement de calendrier, le 2 septembre prochain. Pour une première depuis plus de 20 ans, tous les partis politiques sont sur la ligne de départ. Il s’agit du RHDP (parti au pouvoir), du PDCI, du PPACI et du FPI (tous de l’opposition). En attendant que les indépendants entrent en course pour fausser les calculs de ses partis politiques, chacun sort sa calculatrice pour voir les zones qui lui sont favorables, celles où les duels seront difficiles et celles où il part avec un grand désavantage lié à une faible implantation du parti. Mais l’analyse de ces élections ne se fera pas que sur le nombre de sièges que chaque parti aura gagné. Le nombre d’électeurs et aussi les performances de chaque parti dans les bastions qui lui sont, à priori défavorable, donneront des clés d’analyses pour ce que sera l’élection présidentielle de 2025.

La participation au scrutin de tous les partis politiques est de plus en plus acquise. Après les élections législatives de mars 2021, tous les partis politiques significatifs, viennent de publier la liste de leurs candidats. Après le Rassemblement des houphouetistes pour la démocratie et la paix (RHDP), le Parti des peuples africains (PPACI), le Front Populaire ivoirien (FPI), le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) a rendu public sa liste le mardi 2 avril. Si d’habitude ces partis, attendaient les derniers moments pour rendre officiel leurs listes,  sous l’impulsion du RHDP, ils s’y sont vite pris afin de donner plus de chance à leurs candidats et réduire le nombre de candidats indépendants qui pourraient venir de leur rang.  Là où le RHDP affiche complet, le PDCI aligne 27 candidats aux régionales et 163 pour la mairie, le PPACI affiche 22 candidats pour les régionales et 122 pour les mairies. Pour rappel ; le RDR qui s’est élargi avec le RHDP a toujours été présent sur l’ensemble du territoire lors des élections locales et  les a toujours remportés en termes de nombre d’élus. En 2018 par exemple le RHDP était en tête avec 92 maires élus soit 46 % des conseils municipaux, les indépendants venaient en tête avec 56 maires  soit 28 %, le PDCI RDA : 50 maires soit 25% et le FPI 02 soit 01%.  Au régionales les résultats se présentaient comme suit RHDP : 18, soit 60 % des Conseils ; PDCI RDA : 06, soit 20% ; INDEPENDANTS : 03, soit 10 % ;  PDCI RHDP : 02, soit 6,67% et FPI : 01, soit 3,33 %. En 2001, Le Rassemblement des républicains (RDR) d'Alassane Ouattara, l’avait emporté dans 64 municipalités sur 195. Le Parti démocratique de Côte-d'Ivoire (PDCI), s’était octroyé 58 municipalités et Le Front populaire ivoirien (FPI) du président Laurent Gbagbo alors au pouvoir n’avait obtenu que 34.

Une longueur d’avance pour le RHDP Au regard des listes publiées, le RHDP part favoris avec une longueur d’avance sur tous les partis. Tout en croisant les listes, l’on se rend compte qu’au niveau des régionales, le parti au pouvoir n’aura pas d’adversaire du PDCI et du PPACI (les principaux partis d’opposition) dans 4 régions (Bagoué, Boukani, Kabadougou et Tonkpi).  Cet avantage devrait être encore plus grand si l’on considère l’ensemble des 11 régions de la partie nord du pays comme des bastions du parti au pouvoir.  Pareille pour les élections municipales où le PPACI et le PDCI sont absents dans 24 communes principalement dans le nord du pays. Absents dans 13 autres communes du centre, de l’est et du sud-ouest, le PPACI abandonne d’office plusieurs communes anciennement acquise à la cause de Laurent Gbagbo tel que la commune d’Adzopé et Affery ( Est ) , de Vavoua et Bediala (Ouest) ou encore de San Pedro, Tabou  (sud-ouest).  Le Parti de Laurent Gbagbo n’a pas non plus de candidats dans 6 communes du V baoulé (centre).  Quant au PDCI, il est aux abonnés absents dans les grandes communes d’Issia et de Divo (ouest) de même qu'à Affery (Est). Une situation qui fait la joie d’un RHDP en quête de nouveaux bastions et qui veut jauger l’impact de ses actions de développement sur les populations.

Les femmes absentes Gros bémol pour ces élections, l’absence des femmes sur les listes de candidatures. Chacun des trois grands partis (RHDP, PDCI et PPACI) aligne une femme candidate. C’est-à-dire qu’en cas de victoire de chacune de ses femmes, les 31 conseils régionaux que compte le pays n’auront que 3 femmes élues.  Au niveau des municipales, le RHDP aligne 22 femmes, le PDCI 10 et le PPACI 11. Une situation qui a déjà soulevé l’indignation du Conseil national des droits de l’homme (CNDH) et qui met mal à l’aise le compendium des femmes compétentes.  Ce n’est donc pas pour demain la réalisation de l’objectif des 1/3 de femmes dans les assemblées élues. Mais les partis politiques s’en défendent. «  Ce sont des élections. Chacun place les meilleurs candidats pour la compétition et rien ne sera donné aux femmes si elles ne se battent pas en interne pour se faire de la place » semble répondre en cœur les partis politiques.  Mais les femmes pourraient se consoler avec une présence massive sur les listes des conseils régionaux et municipaux.

Place aux alliances  Les listes étant désormais officielles, les partis devraient annoncer bientôt les alliances qu’ils feront. Lors des législatives précédentes le parti d’Henri Konan Bédié et celui de Laurent Gbagbo alors en gestation avait fait liste commune dans certaines circonscriptions.  Pour ces élections, le PDCI souhaite faire des alliances « stratégiques » et n’écarte nullement le fait de s’associer au PPACI ou RHDP en fonction de certaines zones « pour l’intérêt du PDCI).  S’il est clair que le RHDP et le PPACI n’auront aucune alliance, le PDCI pourrait être ainsi adversaire et allié de chacun de ses partis dans différentes circonscriptions. Reste à savoir si ces différents potentiels alliés accepteront d’accompagner le PDCI dans cette posture. Un tel jeu pourrait également empêcher les partis politiques d’avoir une visibilité sur le poids électoral dans chaque circonscription.  Le RHDP et le FPI qui viennent de signer un accord de partenariat, pourrait également s’accorder sur des alliances dans plusieurs localités. Absent officiellement du scrutin, le GPS, proche de Guillaume Soro devrait avoir des candidats indépendants dans une poignée de communes tant à Abidjan qu’à l’intérieur du pays. Ils seront ainsi absents des jeux d’alliances et devront compter sur leur propre force.

Taux de participation  L’’autre enjeu principal de ces élections sera le taux de participation. Largement en deçà de 50 %  (39% en 2001,  34 % en 2013 et 46 % en 2018), le taux de participation pour 2023 pourrait être plus élevé que les précédents. Et pour cause, ces élections se présentent comme un avant-goût de la présidentielle de 2025 qui pourrait être un remake de celle de 2010.  Tout en comptant le nombre d’élus, les partis compteront également le nombre de votants. Des chiffres qui permettront déjà de donner une visibilité sur le scrutin de 2025. Mais, comme à chaque scrutin de ce type, les indépendants pourraient être des troubles fêtes et perturber les calculs des partis traditionnels. Mais dans l’ensemble chaque parti aura une idée claire sur ses capacités à mobiliser ses militants. Les regards seront surtout tournés vers le PPACI qui est à sa première participation électorale en tant que parti politique et qui espère montrer aux yeux de l’opinion nationale et internationale que Laurent Gbagbo a encore de nombreux militants et peut encore compter sur certaines de ces bases locales.

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