Ils étaient cinq au départ. Ils ne sont plus que trois à vouloir succéder à Navigué Konaté, à la tête de la Jeunesse du front populaire ivoirien (JFPI) depuis 18 ans. Honorat Djanwé a désormais le soutien de deux autres candidats, qui se sont retirés en sa faveur. Il aura en face de lui Guillaume Vavi et Ferdinand Gnan Lia. Deux candidats tout aussi ambitieux que lui et qui ont déjà fait leurs preuves auprès de la jeunesse du parti. Après avoir sillonné les bases des militants pendant un peu plus de deux mois, ils seront face à ces derniers les 21 et 22 septembre au Palais de la culture afin de solliciter leur suffrage. Un rendez-vous important pour un parti qui évolue désormais sans allié.
Il y a près de six mois, quand Pascal Affi N’Guessan annonçait un congrès extraordinaire pour le renouvellement de la tête de la jeunesse de son parti, le Front populaire ivoirien (JFPI), certains y voyaient des signes d’implosion. Pour cause, depuis plus de dix ans que le mandat de Navigué Konaté avait pris fin, plusieurs appétits avaient été nourris. Face aux ambitions des uns et des autres, la température était montée d’un cran, obligeant le Président Affi à faire des concessions afin de contenter tous les camps. La JFPI, devenue maintenant Secrétariat national chargé de la jeunesse, part ainsi à un congrès extraordinaire, le premier du genre. Et pour cause : élu en 2001 pour un mandat de 4 ans, Navigué Konaté enregistre un record d’ancienneté à la tête de la branche jeune de ce parti, avec 18 ans au compteur. En plus de la crise de 2002, qui n’a pas laissé le temps au FPI de renouveler ses instances, le départ en exil et la crise interne n’ont pas non plus facilité les choses. Le parti avait donc fait le choix d’attendre un climat plus propice pour se restructurer. La bataille s’annonce rude entre les trois candidats en lice. Chacun part avec ses avantages et ses contraintes. Ils étaient cinq au départ, Roger Guy Yro, Jean Goré Bi, Honorat Djanwé, Guillaume Vavi et Ferdinand Gnan Lia. Mais, après quelques tractations, Roger Guy Yro et Jean Goré Bi ont décidé de soutenir Honorat Djanwé. Les 21 et 22 septembre, chacun des trois candidats définitifs espère rafler la mise pour les quatre années à venir.
Trois en un Il apparait comme le candidat le plus expérimenté. Mais c’est aussi là son talon d’Achille. Honorat Djanwé, qui représente désormais trois candidatures (deux personnes s’étant désistées en sa faveur), compte 18 ans de militantisme au sein du bureau de la JFPI. C’est un compagnon de longue date du Président sortant, Navigué Konaté. Pour lui, il s’agit de mettre son expérience au service de la JFPI, dont il connait l’histoire et les rouages. Son slogan « Ensemble tout redevient possible » appelle les anciens et les nouveaux à s’unir pour bâtir l’avenir. Confiant, il estime que les différentes crises qui ont traversé la JFPI l’ont aguerrie et lui ouvrent les portes de la renaissance. « Au-delà de la mobilisation de la structure, il s’agit de mettre nos militants en ordre de bataille », explique celui qui est numéro 2 de la JFPI depuis février 2015. « J’ai été l’artisan de la phase de la restauration de la JFPI et le maitre d’œuvre de l’opération de mobilisation des militants lancée en 2015 et baptisée « Opération fourmi. » Cela consistait à remettre sur pied les structures de base. Et je veux mettre cette expérience au service de la JFPI », explique-t-il, tout en appelant à un savant dosage entre les anciens, ceux de sa génération et les plus jeunes militants. Mais cela pourrait être un gros handicap pour lui. Il est âgé de 44 ans et sa candidature a fait grincer des dents certains cadres du parti. Et cela pourrait lui jouer des tours face à des candidats plus jeunes et plus proches de la plupart des électeurs. Un terrain sur lequel ses adversaires engagent d’ailleurs parfois le débat. Certains ont même manœuvré afin que sa candidature soit rejetée. Sans succès. Ils préfèrent désormais utiliser son âge comme unargument de campagne contre lui. Mais, pour Honorat Djanwé, ingénieur informaticien et développeur de bases de données, ces arguments ne tiennent pas, car il « est un visage connu de la lutte de la JFPI, tant avec ceux qui sont dans la dissidence qu’avec les nouveaux militants et les plus jeunes ».
Bouger et faire bouger De son côté, le candidat Ferdinand Gnan Lia se dit plus que confiant. « J’aime les challenges. Ils se sont mis à trois et je vais battre trois personnes d’un coup », lance-t-il. Sa candidature est selon lui motivée par le fait que la JFPI « a arrêté de bouger. Il faut donc la faire bouger et, pour y arriver, il faut un homme qui bouge », explique-t-il. Pour Ferdinand, 35 ans, bien que fragilisée par une crise interne, la JFPI doit rester debout. Conscient des enjeux qui l’attendent, il dit compter sur « un génie politique » qu’il a su développer après avoir parcouru plusieurs sections de base, tant à Abidjan qu’à l’intérieur du pays. « La fougue d’hier a disparu et nous sommes à la recherche d’un leader fougueux et ambitieux ». Mais ses adversaires lui reprochent de ne pas avoir de passé de militant de base. « Il n’a pas évolué dans les sections de base et atterrit comme un cheveu sur la soupe », confie un membre d’un staff de l’un de ses adversaires. « Ils ignorent qui je suis. J’ai gagné une élection municipale avec le FPI à Duékoué. J’ai été militant de base en 2006 avec la coordination d’Abidjan. En tant que militant de base, j’ai été appelé en 2015 au sein du Bureau exécutif de la JFPI et en plus nommé Secrétaire national chargé des fédérations de la région du Guémon », réplique-t-il en réponse à ses détracteurs. Administrateur des transports, il espère avoir convaincu un grand nombre de ses camarades afin de faire pencher la balance en sa faveur au soir du 22 septembre.
Plus jeune, plus dynamique ? Il est le plus jeune des trois candidats en lice et se dit plus dynamique. À 31 ans, Guillaume Vavi, qui se présente comme un opérateur économique, a été responsable de section FPI à Divo alors qu’il était encore élève. Membre de la fédération de Yopougon Port Bouët II, il estime avoir gravi tous les échelons pour se permettre d’avoir l’ambition de briguer le poste de premier responsable de la JFPI. « Mon objectif est d’aider le parti à reconquérir le pouvoir en 2020 et ma campagne se fait sous les sceau de l’unité au sein du FPI ». C’est pourquoi il met en avant sa participation depuis trois ans aux efforts des communicateurs pour l’unité du parti (CUFPI). Comme argument majeur, celui qui soutient avoir travaillé pour la réalisation du « Congrès de Mama », favorable à la dissidence, dit avoir ouvert les portes de la ville de Divo à Pascal Affi N’Guessan dans le cadre de l’opération « Socrate ». « Divo était un grand bastion de la fronde et les tentatives d’Affi pour parler aux militants de cette ville échouaient. À mon initiative personnelle je lui ai ouvert les portes de cette ville, où il a pu convaincre certains de nos camarades de la fronde ». Des actions qu’il n’a pas manqué de présenter aux différents électeurs durant ses tournées de campagne. S’il se présente comme un ancien membre de la fronde, il espère pouvoir utiliser ce passé afin de rapprocher les deux camps de son parti.
Ouakaltio OUATTARA