Hôpitaux publics : négligence meurtrière

Depuis des décennies, l’état des hôpitaux publics en Côte d’Ivoire, préoccupe. Malgré les récents efforts du gouvernement pour réhabiliter, construire de nouveaux centres et améliorer le plateau technique, le problème reste entier. Alors que la généralisation de la Couverture maladie universelle devient une nécessité, pour l’accès des plus démunis aux soins, l’état d’esprit du personnel de santé n’a jamais été aussi inquiétant. Menace de grève, mauvais accueil, négligence professionnelle, erreurs médicales fréquentes etc. De quel mal souffre le système de santé ivoirien ? Enquête.

Le directeur de l’hôpital général d’Adzopé, François Dagri Ngatta a été relevé de ses fonctions. Dagri N’Gatta est suspendu suite au drame survenu à Adzopé le 5 mai dernier, qui a entraîné le décès d’une femme enceinte et son bébé. Le médecin gynécologue de l’hôpital, Isidore Bli Bli, a également été suspendu des activités professionnelles avec saisine du président de l’ordre des médecins de Côte d’Ivoire. Trois  sages-femmes ont aussi été suspendues d’activités professionnelles. Selon l’inspecteur général de la santé, le docteur Ablé Ekissi, l’enquête menée par le ministère de la Santé a relevé des négligences de la part des concernés, qui ont entraîné le décès de la patiente Habi Zerbo, venue accoucher.

Cette dernière décédera plusieurs heures après son arrivée au sein dudit hôpital, suite à une chute de la table d’accouchement. La négligence et le manque d’assistance rapide dont la victime avait besoin ont provoqué son décès et poussé les autorités à réagir. Ce drame reste l’une des bavures hospitalières les plus médiatisées de ces dernières années. Avant ce fait, début-avril, Moro Armand accusait des agents de santé du centre hospitalier et universitaire (CHU) de Cocody de n’avoir pas porté assistance à sa femme enceinte de jumeaux. Les enfants sont décédés après que cette dernière a été admise au CHU. Si le personnel soignant réfute cette accusation, le couple Moro a tout de même été reçu en audience par le ministre de la Santé, de l’hygiène publique et de la Couverture maladie universelle, le 14 avril dernier. Ce dernier a promis qu’une enquête serait menée pour comprendre comment Mme Moro a perdu ses jumeaux. Que se passe-t-il donc dans nos hôpitaux ? Le personnel est-il accusé à tort ou, au contraire, doit-on s’en inquiéter ?

Réseaux sociaux « Ce sont les réseaux sociaux qui accusent le personnel de santé de négligence. Rien n’a encore été établi dans ce sens. Nous vivons dans une société où le personnel de santé est à l’image de sa population. Il y a donc beaucoup d’éléments à prendre en compte dans ce genre de situation », dépeint Boko Kouao, porte-parole de la Coordination des syndicats du secteur santé (COORDISANTE).

Selon lui, les enquêtes diligentées par les autorités ont en général démontré l’innocence des travailleurs impliqués. Dans le cas de l’hôpital général d’Adzopé, par exemple, on attend le jugement pour se fixer. Les sages-femmes qui suivaient la patiente ont tout fait pour que cette dernière soit transférée dans un établissement plus équipé afin de se faire assister médicalement. En vain. Mais les véritables questions demeurent sans réponse. Pourquoi dame Zerbo est-elle tombée du lit d’accouchement ? Comment l’hôpital a-t-il pu se retrouver en incapacité de lui porter assistance, au point que le personnel a tenté de la transférer vers un autre établissement sanitaire ? Des minutes fatales qui vont coûter la vie à Habi Zerbo.

Comportement Les drames qui surviennent dans les hôpitaux sont très souvent le fruit d’une succession de faits. Ce qui rend compliqué la position des autorités quand il faut prendre des décisions. « Avez-vous une idée du nombre de personnes qui meurent dans les hôpitaux tous les jours ? Si on accusait le personnel de santé à chaque fois que cela arrivait, on ne s’en sortirait pas », souligne Boko Kouao. Il n’a pas tout à fait tort. Pour Dr Guillamue Akpess, il y a longtemps que la population pointe de l’index le comportement du personnel soignant vis-à-vis des patients. « Mais ce n’est pas une question de formation. Le personnel soignant est bien formé, au contraire. Le problème se situe au niveau des mentalités », note le secrétaire général du Syndicat national des cadres supérieurs de la santé de Côte d’Ivoire (SYNACASS-CI).

Dr Emmanuel Kiroua, délégué général de médecine à l’université de Cocody, renchérit: « c’est un mauvais diagnostic que font les populations. Ce qui se passe dans les hôpitaux n’a rien à voir avec la formation que nous suivons. Le problème, c’est d’abord le comportement des uns et des autres, ensuite le manque de plateaux techniques adéquats ».

À l’entendre, les personnes qui sortent des écoles de formation du pays sont bien outillées. Une affirmation confirmée par Tassohou Billy Graham, le délégué des étudiants de l’Institut national de formation des agents de la santé (INFAS) : « Les infirmiers qui sortent de l’Infas font partie des meilleurs dans la sous-région ».

Mentalité Alors, voilà que la mentalité des Ivoiriens revient encore sur la table.  Quasiment tous les ministres qui ont occupé le département de la santé ont eu à sensibiliser dans ce sens. Le problème central a toujours été le manque de motivation. Après plusieurs grèves dans le milieu pour exiger de meilleures conditions de vie et de travail, la COORDISANTE et le SYNACASS-CI ont obtenu l’adoption de la réforme hospitalière qui octroie, entre autres, des primes de motivation au personnel de santé. Le chef de l’Etat y a mis du sien. Des primes covid-19 ont été mises en place pour les motiver dans cette pandémie sanitaire. Cela suffit-il à changer les mentalités ? « Beaucoup de choses se sont améliorées, mais il faut encore du temps », note un proche collaborateur du ministre de la Santé, qui estime qu’il faudra aussi recruter du personnel soignant, car dans de nombreux hôpitaux on travaille en sous-effectif. « Le personnel de santé est beaucoup plus concerné qu’avant. Tout ne peut pas être encore parfait, mais nous avons salué l’avènement de la réforme hospitalière. C’est pour cela qu’il faut faire attention quand on parle de négligence professionnelle. Il faut connaître les véritables causes », reprend Boko Kouao.

Cette véritable cause, d’après lui, c’est le manque d’équipement dans les hôpitaux. Philippe Kambou, enseignant à la faculté de médecine de l’université de Cocody, témoigne : « Au CHU de Cocody, par exemple, comment comprendre qu’on ne puisse pas faire une IRM (imagerie par résonance magnétique) ? Il y a des hommes compétents, mais il n’y a pas de matériel ». Des personnes qui viennent pour des rendez-vous doivent passer plusieurs jours après. Et un décès peut survenir pendant ce temps. Comment appelle-t-on cela ?  S’interroge l’enseignant. Dame Zerbo aurait eu la vie sauve si elle n’était pas tombée du lit, certes. Ce qui explique d’ailleurs la décision des autorités de doter désormais les lits d'accouchement de barrières de protection. Mais, elle serait surtout en vie si on l’avait assistée au sein même de l’hôpital, après sa chute. Dans ce drame, il faut donc savoir quel a été le véritable problème.  Le Plateau technique est défaillant : tout le monde le sait aujourd’hui. Le chef de l’Etat l’a déjà souligné. L’amélioration du plateau technique dans les hôpitaux sera l’un des ses chantiers dans le secteur de la santé en même temps que la généralisation de la CMU.

« Que faire de plus, sinon continuer à sensibiliser. Nous avons été plombés par des décennies de crises. Pendant presque vingt ans, la Côte d’Ivoire n’a pas investi dans le secteur de la santé. La démographie a augmenté pendant que les infrastructures se dégradent. C’est à partir de 2011 que l’Etat a véritablement commencé le travail de réhabilitation et de construction des hôpitaux. Ça va prendre encore du temps. Mais, il faut déjà féliciter les efforts du chef de l’Etat depuis son arrivée à la tête du pays. Ce qui aidera la Côte d’Ivoire, c’est qu’il y ait une continuité après », explique notre source au ministère de la Santé.

Raphaël Tanoh

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