Alternance : Les bons élèves de la sous-région

Les populations des pays ouest-africains entrent progressivement dans leur rôle de citoyens actifs, même si les progrès au niveau des institutions sont non seulement faibles mais également réversibles. Certains pays arrivent tout de même à tirer leur épingle du jeu.

L’alternance politique est un phénomène suffisamment exceptionnel en Afrique pour que certains cas méritent d’être soulignés. Sur les 200 chefs d’État qui se sont succédé sur le continent depuis 1960, une vingtaine seulement a quitté le pouvoir volontairement et, sur ce nombre, la moitié l’a fait dans le cadre d’une transition démocratique.

Le Ghana Les gouvernants, successivement depuis trente-cinq ans Jerry Rawlings, John Agyekum Kufuor, John Atta-Mills, John Dramani Mahama et à présent Nana Akufo-Addo, ne manipulent pas la Constitution pour rester en place. Et, quand ils sont battus, ils abandonnent le poste avec élégance. Pour en arriver là, il a fallu que le pays passe par différentes phases, douloureuses parfois. 12 ans de parti unique, 23 ans de régime militaire, 23 ans de pluripartisme. Nana Akufo-Addo, l’actuel Président, fit en février 2006 devant les étudiants de l’Université de Kumasi un résumé imagé de l’histoire de son pays. Si la politique s’y joue avec vigueur, mais sans débordements violents, c’est que le Ghana dispose aujourd’hui d’institutions et de règles acceptées. Pour devenir ministre, préfet, juge à la Cour suprême ou membre du Conseil d’État, il faut passer devant l’Assemblée nationale. Après avoir été désigné par le président, le candidat se présente devant une commission parlementaire pour « vérification » (vetting) avant de prêter serment devant les juges de la Cour suprême. Ce n’est pas une simple formalité : les députés en profitent pour affirmer leur indépendance, avec un empressement parfois proche du zèle.

Le Sénégal Le 19 mars 2000, Abdoulaye Wade, soutenu par une coalition de partis politiques regroupés au sein du Front pour l’alternance, mettait fin au long règne du Parti socialiste. Pour reprendre le mot d’un homme politique sénégalais, « l’opposition venait de déraciner un baobab ». Battu par son vieux rival, le Président Abdou Diouf reconnaissait rapidement sa défaite et acceptait l’alternance, au grand soulagement de la population et des observateurs étrangers, qui craignaient un blocage du processus électoral et un déchaînement de la violence. Il en sera de même en 2012 lors de l’élection du Président Macky Sall. En reconnaissant sa défaite et en appelant dès le soir du 2ème tour Macky Sall, Abdoulaye Wade a certainement voulu empêcher son entourage de contester le résultat.

Le Bénin Le modèle démocratique du Bénin est régulièrement cité en exemple en Afrique noire francophone, avec celui du Sénégal. Il offre une alternance régulière et sans heurts au sommet de l’État, ainsi qu’une régularité satisfaisante dans l’organisation des élections, qu’elles soient nationales, communales, municipales ou locales. La Constitution n’a jamais été révisée, offrant ainsi aux acteurs politiques, économiques, sociaux et culturels, nationaux comme étrangers, un cadre juridique stable et sécurisé. Cette stabilité profite également au pouvoir judiciaire, qui a eu le temps d’imposer ses jurisprudences en matières constitutionnelle, judiciaire et administrative.

Nouvelle dynamique Une cartographie des alternances survenues depuis 2000 place les pays de l’Afrique de l’ouest au nombre des États ayant porté au pouvoir de nouveaux présidents. La tenue d’élections plus ou moins transparentes, ainsi que l’implication politique de la société civile et de la diaspora, ont diversement concouru à l’avènement d’une alternance dans ces pays. L’Afrique noire ne comptant quasiment plus de pays qui n’admettent pas le multipartisme, les États organisent à peu près tous des élections qui sont au moins formellement compétitives. On peut citer, entre autres exemples, le Burkina Faso, la Guinée et la Gambie. De manière générale, la culture des élections et de l’alternance semble prendre racine en Afrique de l’Ouest. Formellement, les élections organisées de 2000 à ce jour et ayant provoqué l’arrivée d’opposants aux affaires ont été dans une large mesure assez transparentes.

Yvann AFDA

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