En Côte d’Ivoire, les élections présidentielles se suivent et se ressemblent. Face au boycott du RDR et du FPI en 1995, Henri Konan Bédié s’était retrouvé face à Francis Wodié, un candidat jugé de faible poids. En 2020, ce schéma semble se dessiner de nouveau.
Déjà en 1990, quand toute l’opposition décide de boycotter l’élection présidentielle, Laurent Gbagbo, qui croit en ses chances de battre Félix Houphouët Boigny, dribble tout le monde au dernier moment et se lance dans la course. Cinq ans plus tard, face à Henri Konan Bédié, après le rejet de la candidature d’Alassane Ouattara, l’opposition lance un « boycott actif » du scrutin. Francis Wodié décide de ne pas suivre ce mot d’ordre et maintient sa candidature. 25 ans après l’histoire pourrait se répéter, avec presque les mêmes acteurs mais dans différents rôles. D’un côté Alassane Ouattara, qui pourrait se retrouver face à un candidat de petit gabarit, et en face un boycott du scrutin lancé par Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo.
La roue tourne Ironie du sort, serait-on tenté de dire, pour ce qui concerne la vie politique en Côte d’Ivoire. Les différents leaders, Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo, sont dans une sorte d’interactivité de jeu de rôles. Et l’histoire semble par moments stagner et se répéter. La campagne pour la présidentielle 2020 s’ouvre ce jeudi 15 octobre à minuit et, même si Henri Konan Bédié et Pascal Affi N’Guessan annoncent qu’ils n’iront pas au scrutin, aucun d’eux n’a encore saisi la Commission électorale indépendante ou le Conseil constitutionnel pour acter sa non-participation. Mais cela pourrait se faire avant la tenue de l’élection. Le candidat Alassane Ouattara se retrouverait alors face à Bertin Kouadio Konan, un candidat de faible poids, face auquel il passerait haut les mains. Mais, comme après l’élection de 1995, les tensions politiques ne devraient pas baisser pour autant après le scrutin. L’opposition continuera à réclamer un dialogue politique, une phase de transition et peut-être des Assises nationales, afin de tenter de vider les contentieux politiques. Le parti au pouvoir acceptera-t-il ces exigences ? Le gouvernement estime avoir ouvert en 2019 un dialogue avec l’opposition. Celle-ci, selon le Premier ministre Hamed Bakayoko, a quitté la table des négociations, car « elle avait un autre agenda. Celui du report du scrutin et de l’ouverture d’une transition alors que toutes les institutions fonctionnaient normalement ». Pour l’heure, les deux camps avancent dos à dos et préparent le lit d’une crise post électorale qui, même si elle n’aura la même ampleur que celle de 2010, pourrait exacerber les tensions dans le pays.
Yvann AFDAL