Soumahoro Ben NFaly : « Les Ivoiriens ont honte de manger le riz local »

Soumahoro Ben NFaly est le président de la Fédération ivoirienne des consommateurs le Réveil et vice-président du Conseil national de la consommation, un organe consultatif étatique. Dans cette interview il évoque les progrès faits dans la lutte contre la cherté de la vie.

 

 

Comment a été le marché de la consommation en Côte d’Ivoire en 2025 ?

Nous sommes des éternels insatisfaits. Mais il faut être honnête, en Côte d’Ivoire beaucoup a été fait sur bien des aspects pour améliorer notre niveau de vie. Ce n’est pas seulement ce qu’on mange qui concerne les consommateurs. Le premier droit que les Nations unis nous attribuent, c’est le droit à la sécurité. Et nous constatons que sur ce point, la Côte d’Ivoire est à un niveau acceptable.

 

L’année 2024 a été marquée par la pénurie de sucre. La situation a-t-elle été maitrisée en 2025 ?

Le marché est bien approvisionné. Le kg de sucre roux est redescendu à 825 FCFA. La crise du sucre est derrière nous.

 

Quelle était la cause de cette pénurie ?

Le ministère du Commerce avait évoqué deux phénomènes. La maladie du sucre et une usine qui était en panne. Ce sont ces deux faits combinés qui ont créé la pénurie. Le temps de commande du sucre et la distribution pouvait prendre 3 mois. Nous espérons que ça ne se reproduira plus. Sinon, nous allons demander qu’un quota de sucre soit importé en Côte d’Ivoire. Parce que les producteurs ne veulent pas que cela se produise.

 

Le sac de ciment avait lui aussi connu une hausse

Oui, c’est vrai. Mais le paquet de ciment est à 4750 FCFA. On était à 6500 FCFA. Vous ne verrez plus personne vendre au-delà de 5000 FCFA, le sac. Là aussi il y a du mieux.

 

Le kilogramme de viande est lui passé à 3500 FCFA

Nous ne sommes pas producteurs de bétail. Le Burkina Faso, le Mali et le Niger nous fournissent à 70% en bœufs. Et tout le monde connait la situation de ces pays. Voilà pourquoi nous avons exhorté le gouvernement à encourager la production nationale. Il faut accompagner ceux qui s’engagent dans l’élevage de bovins. Nous avons des espaces en Côte d’Ivoire. S’il y a la volonté politique en 5 ans, nous pouvons nous autosuffire en viande. La hausse du kg de viande de bœuf ne dépend pas de nous. Et la situation peut s’aggraver s’il n’y a pas d’accalmie dans les pays qui nous approvisionnent.

 

Est-ce parce que les opérateurs ne parviennent pas à importer suffisamment de bœufs, ou c’est simplement à cause du trajet devenu cher ?

Les deux. Un camion peut transporter 35 bœufs. Le trajet revient à un millions FCFA environ aux opérateurs, parce qu’ils doivent gérer les djihadistes et aussi les forces de l’ordre. Ce même trajet lorsqu’il n’y avait pas la guerre dans les pays exportateurs, coûtaient entre 400  et 500 000 FCFA. Il faut ajouter à cela le fait qu’il y a moins de camions de bœufs. C’est pourquoi la viande revient chère.  Plus la guerre durera dans ces pays, plus la marchandise sera rare et les prix vont flamber.

 

 

Le prix du kilogramme de riz a du mal à être respecté dans quelques surfaces...

Il n’y a plus de tension autour du riz, tout simplement parce que le tarif du fret est redevenu normal. Au contraire, les prix baissent, à part quelques commerçants véreux. Avec le riz Maman, par exemple, au lieu de 15 450 FCFA pour le sac de riz de 50kg, ils le vendent à 17 000 FCFA.

 

Les producteurs locaux estiment que vous ne mangez pas ivoiriens. Et que c’est l’une des raisons pour lesquelles le prix du riz flambe par moments.

Nous allons engager des discussions avec eux, pour amener les Ivoiriens à consommer le riz local.

 

 

Pourquoi les Ivoiriens rejettent-ils du riz produit chez eux ?

Parce que nous sommes complexés. Certains ont honte de consommer cette denrée. On se dit que manger du riz local signifie que tu es tombé, alors que c’est du riz de très bonne qualité.

 

Le marché du vivier a fait l’objet de réflexion. Le gouvernement met les moyens pour qu’on puisse produire assez d’oignon, de tomate, de piment, d’igname. Est-ce que cela se ressent déjà sur le marché ?

Donner les moyens aux femmes et la mise en œuvre de cette politique, prendra du temps. De plus, nous pensons qu’il ne faut pas donner les moyens aux coopératives, car c’est le business qui les intéresse. Il faut plutôt aller donner ces moyens aux vrais paysans. Sinon nous n’y arriverons pas. L’autre problème avec le vivrier, c’est que certains produits sont périodiques. Il ne faut pas forcement chercher à manger du foutou banane quand ce n’est pas la période de la banane plantain.  Ne cherchons pas à manger des produits quand ce n’est pas la période, parce qu’on contribue à la cherté de la vie. C’est le Maroc, la Hollande, le Niger et le Burkina Faso qui nous fournissent en oignon et en pomme de terre. Il y a des périodes où le Burkina cesse de nous fournir. Pendant cette période vous verrez que les prix augmentent.

 

 

Quid du pain ?

Il y a toujours un problème avec le pain. Nous n’avons plus de souci en approvisionnement en blé. Mais la majorité des boulangeries continuent de nous voler sur le poids du pain. Les baguettes ne respectent plus le poids normal.

 

Où en est-on avec les contrôles ?

Les contrôleurs ne sont pas en nombre suffisant pour couvrir le territoire.

 

Le plafonnement des prix a-t-il été un succès dans son ensemble ?

Le plafonnement ne veut pas dire que tous les prix doivent être harmonisés. Seulement personne ne doit aller au-delà du prix plafonné. Vous pouvez avoir des prix plus bas que le voisin mais aucun de vous n’a dépassé le plafonnement. Ce n’est pas une faute.

 

 

 

Que faudra-t-il améliore en 2026 ?

Il faut anticiper sur les différentes crises. Quand on sait à partir de quelle période tel produit augmente, il faut anticiper. Dans nos hôpitaux, nous dénonçons la prise en charge des malades qui ne respecte pas toujours les normes. Les sage-femmes font payer nos sœurs alors que l’accouchement est censé être gratuit. Mais finalement vous vous retrouvé à payer des kits médicaux. Il faut les obliger à produire une facture pour les kits d’accouchement qu’elles font payer à nos femmes. Les médecins quant à eux, continuent de détournent les malades vers les cliniques privés.

 

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