Richesse par habitant : La Côte d’Ivoire dépasse le Nigéria et l’Angola

Après avoir récemment dépassé le Nigeria, premier producteur africain de pétrole, la Côte d’Ivoire vient de réaliser l’exploit de dépasser en richesse par habitant l’Angola, second producteur continental de pétrole, avec une production environ trente fois supérieure, et second producteur africain de diamants. Cette performance est le résultat des nombreuses réformes accomplies au cours de la dernière décennie, ainsi que d’une politique active de diversification.

Selon les données récemment publiées par la Banque mondiale, la Côte d’Ivoire affichait un PIB par habitant de 2 326 dollars début 2021, dépassant ainsi désormais l’Angola dont la richesse par habitant, en baisse depuis quelques années, s’établissait à 1 896 dollars. Par ailleurs, la Côte d’ivoire continue à creuser l’écart avec le Nigeria (2 097 dollars) ou encore avec le Kenya (1 838 dollars).

Une grande performance Cette évolution constitue un véritable exploit pour la Côte d’Ivoire, dont les activités extractives (hydrocarbures et industries minières) demeurent encore assez modestes, notamment par rapport à l’Angola. Ce pays, à la population comparable (33 millions d’habitants contre 27 millions pour la Côte d’Ivoire), est en effet le deuxième producteur africain de diamants, après le Botswana (et le quatrième mondial), ainsi que le deuxième producteur de pétrole avec une production qui se situe encore, et malgré une baisse régulière ces dernières années, à environ 1,2 million de barils par jour, contre environ 35 mille seulement pour la Côte d’Ivoire. Une faible production ivoirienne qui est également très loin derrière celle du Nigeria (près de 2 millions de barils/jour, soit environ 50 fois plus), qu’elle avait aussi et récemment dépassé, et qui devrait également, tout comme l’Angola, être bientôt devancé par le Sénégal et le Cameroun, qui affichent souvent des taux de croissance deux ou trois fois plus élevés.  

L’importante progression de la Côte d’Ivoire résulte de la très forte croissance que connaît le pays depuis plusieurs années. Sur la période de neuf années allant de 2012 à 2020, période suffisamment longue pour pouvoir établir des comparaisons internationales, la Côte d’Ivoire a réalisé la plus forte croissance au monde dans la catégorie des pays ayant un PIB par habitant supérieur ou égal à 1 000 dollars, avec une croissance annuelle de 7,4 % en moyenne. Plus impressionnant encore, elle se classe deuxième toutes catégories confondues, pays très pauvres inclus, faisant ainsi mieux que 30 des 31 pays au monde qui avaient un PIB par habitant inférieur à 1 000 dollars début 2012. La Côte d’Ivoire n’est alors dépassée que par l’Éthiopie, qui a connu une croissance annuelle de 8,9 % en moyenne. Une performance qui résulte essentiellement du très faible niveau de développement de ce pays d’Afrique de l’Est, qui était le deuxième pays le plus pauvre au monde début 2012, et qui en demeure un des plus pauvres avec un PIB par habitant de seulement 936 dollars début 2021 (soit au début de l’actuelle guerre civile).

Par ailleurs, il est à signaler que la Côte d’Ivoire est récemment devenue le premier pays africain de l’histoire (et le seul encore aujourd’hui) disposant d’une production globalement assez modeste en matières premières non renouvelables, du moins jusqu’à présent, à dépasser en richesse un pays d’Amérique hispanique, à savoir le Nicaragua dont le PIB par habitant atteignait 1 905 dollars début 2021. La Côte d’Ivoire est d’ailleurs sur le point de devancer également le Honduras, dont le PIB par habitant se situait à 2 406 dollars.

Dans un autre registre, il est à noter que les performances économiques de la Côte d’Ivoire se sont accompagnées d’une maîtrise de l’endettement, avec un niveau de dette publique qui s’établissait à seulement 45,7 % du PIB début 2021, selon le FMI, contre non moins de 127,1 % pour l’Angola, quatrième pays le plus endetté d’Afrique malgré ses énormes richesses. Le niveau d’endettement de la Côte d’Ivoire demeure également largement inférieur à celui de pays comme l’Afrique du Sud (77,1 %), le Ghana (78,0 %) ou encore le Kenya (68,7 %).

Enfin, la forte croissance de l’économie ivoirienne s’est également accompagnée d’un bon contrôle de l’inflation, qui s’est située à seulement 0,8 % en moyenne annuelle sur la période 2012-2019 (8 années), contre non moins de 16,3 % et 11,6 % pour l’Angola et le Nigeria, respectivement. Deux pays dont les populations les plus fragiles ont été grandement pénalisés par la forte hausse du prix des produits de base. Les graves difficultés économiques de l’Angola et du Nigeria se sont notamment traduites par une importante dépréciation de leur monnaie nationale, qui ont respectivement perdu environ 85 % et 60 % de leur valeur face au dollar depuis 2014 (et, depuis sa création, plus de 99 % de sa valeur pour la monnaie nigériane). Une situation qui a notamment pour conséquence une forte dollarisation de l’économie de ces deux pays, c’est-à-dire une large utilisation du dollar pour les transactions économiques au détriment de la monnaie nationale, considérée comme risquée.

 

Par Ilyes Zouari, Président du CERMF (Centre d’étude et de réflexion sur le Monde francophone).


 

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