De trop nombreuses entreprises (et administrations) fonctionnent en silos. Il s’agit probablement de la forme la plus répandue d’organisation alors même qu’elle n’est enseignée dans aucune business school ou suggérée dans aucun ouvrage de management !
Le silo rassure les managers qui ont peur de voir leurs meilleurs éléments quitter leur entité. Quand on y réfléchit, ceci revient en fait à considérer les salariés comme des prisonniers ! Mais on sait qu’il est illusoire de vouloir empêcher toute mobilité. Au lieu de fidéliser le salarié, le management par silo l’incite à s’évader en saisissant des opportunités à l’extérieur de l’entreprise.
Fonctionner en silo, c’est aussi veiller à l’étanchéité des frontières et s’assurer de conserver pour soi le savoir développé localement. C’est tout l’inverse des bonnes pratiques duknowledge management. Cela renvoie à une conception du management dans laquelle la détention de connaissances constitue une source de pouvoir (alors que c’est le partage des connaissances qui devraient être encouragé).
Dans mes recherches, ainsi que dans mes interventions comme consultant dans différents pays, j’ai constaté que les dirigeants donnent rarement l’exemple. Leurs équipes respectives sont souvent condamnées à fonctionner de façon cloisonnée alors même qu’elles aspirent à pouvoir partager leurs connaissances.
La première étape vers une plus grande transversalité consiste à faire prendre conscience de ce fonctionnement (ou plus précisément dysfonctionnement), notamment au niveau des dirigeants et managers.Il s’agit ensuite de repenser le mode de travail en introduisant par exemple des groupes projets transversaux.
La formation est aussi un puissant levier de changement.En faisant travailler ensemble des managers et dirigeants de différentes entités sur des cas concrets, y compris issus de l’entreprise elle-même, elle participe à la prise de conscience collective.
La direction des ressources humaines a un rôle important à jouer en adoptant une démarche structurée de gestion de carrière : repérage des hauts-potentiels, planification de leur développement et de leur parcours professionnel. Ceci requiert de faire passer en premier l’intérêt général et jouer collectif.
Enfin, l’organisation de toute activité (sportive, culturelle, etc.) impliquant des salariés de différentes entités permet de lutter efficacement contre le fonctionnement en silos. Les relations interpersonnelles sont souvent le principal levier de décloisonnement et de promotion de la transversalité dans l’entreprise !
Professeur à HEC Paris