Longtemps débattue, la question des habitations construites sous les lignes à haute tension revient presque chaque année. Faut-il faire déguerpir ces lieux ou fermer les yeux sur un phénomène sujet à polémique ?
Bonco 1, Aboboté, Cocody, non loin de la CNPS, vers « l’Ambassade de Chine », Mahou, etc. Dénombrer les points sous les pylônes électriques habités reviendrait à égrener un long chapelet, tant les sites sont multiples. Les résidents sont des laissés-pour-compte. Il y a quelques années de cela, Ako Yapo, chef du village D’Agban Aghien (Banco1), lançait un appel au gouvernement à la suite des éboulements qui avaient endeuillé le quartier. « Il n’y a pas que les éboulements qui constituent une menace pour nous, mais aussi le danger qu’il y a à habiter sous des pylônes électriques », s’était-il indigné.
Danger à ciel ouvert Aujourd’hui, la promesse de leur trouver des sites de recasement n’a jamais été tenue, selon la famille du chef. Pour les autorités, ils ont été dédommagés et priés de quitter les lieux dare-dare. Beaucoup ont préféré empocher les sous et rester sur place. Certains ont pris l’argent et sont partis, mettant en location les maisons qu’ils avaient quittées. Quoiqu’il en soit, il y a toujours du monde sous les pylônes à Agban - Aghien. Et aujourd’hui, nombreux sont les autres quartiers touchés par le phénomène. Des garages automobiles aux habitations en passant par les magasins, on trouve un peu de tout sous les lignes à haute tension. Pourtant, les pylônes électriques dégagent des champs électriques EBF, fait démontré par la communauté scientifique. Si les experts n’ont pas jusqu’à là réussi à tomber d’accord sur les risques de cancers, notamment de tumeurs cérébrales, provoqué par ces champs, le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a cependant classé ces zones comme « peut-être cancérogènes » pour les risques de leucémie de l'enfant. « Ce ne sont pas des endroits à conseiller aux gens, quel que soit le débat qu’il y a autour des risques de cancer. Parce qu’il y a d’autres risques », indique Dr Guillaume Esso Apkess, médecin et ancien Directeur général de l’hôpital général de Tiassalé. Là où les conséquences ne sont pas sujettes à débat, ce sont les risques d’accidents : incendies, électrocutions, chutes de pylônes, ruptures de câbles électriques. En dépit de tout cela, les populations refusent de quitter les lieux, faute de sites pour être relogées.
Raphaël TANOH