Confection des manuels scolaires : Les instituteurs souhaitent être associés

Jérôme Ourizalé, Secrétaire général du Syndicat autonome des enseignants du primaire et préscolaire de Côte d’Ivoire (SAEPPCI), parle dans cet entretien de l’importance des acteurs de l’enseignement et du matériel didactique qu’ils utilisent.

Enseigner l’anglais et l’informatique au primaire aujourd’hui serait-il judicieux ?

Oui. Ce n’est pas parce que les enfants ont beaucoup à faire qu’il faut oublier cette idée. L’anglais et l’informatique prennent aujourd’hui une part importante dans la vie des Ivoiriens.

Les plus sceptiques affirment que cela va surmener les élèves et qu’il faut plutôt privilégier la lecture et l’écriture

Dans le nouvel emploi du temps, l’accent est mis sur la lecture et l’écriture. Les heures consacrées à ces deux matières sont les plus nombreuses. Cela dit, ce n’est pas le fait d’avoir dix heures de cours dans une matière qui fait la différence. C’est la motivation. Aujourd’hui, il y a des écoles en Côte d’Ivoire où l’on enseigne les langues maternelles, mais ce sont des projets, des essais. On peut le faire avec l’anglais, mais l’enseignant doit maitriser cette langue. Malheureusement, avec le niveau Bepc, beaucoup n’arrivent même pas à s’exprimer correctement en français.

On parle également d’effectifs pléthoriques…

Hélas oui. Les textes, c’est 50 élèves maximum dans une classe. À Abidjan, il y a des écoles avec des classes de 100 élèves. Un trop grand nombre d’élèves ne permet pas à l’enseignant d’être efficace. Il faut continuer à construire des écoles. Beaucoup. Et à les équiper. Nous sommes surpris de voir les conditions dans lesquelles certains élèves assistent aux cours.

Qu’en est-il de  la conception des manuels pédagogiques ?

La plupart de nos responsables qui travaillent à la confection des ouvrages scolaires du primaire sont du secondaire. Ils ne connaissent pas nos réalités. Dans la pratique, il y a un véritable problème. Vous avez vu les fautes qui ont été commises cette année ? Ce sont les maîtres qui les ont remarquées. Il faut mettre l’enseignant du primaire au centre de la confection des documents du primaire. Notre avis doit être pris en compte, car c’est nous qui utilisons ce matériel. Il faut aussi briser le monopole dans l’édition des manuels scolaires et ne pas tout laisser aux mains de NEI - CEDA. Dans le temps, il y avait une structure, sous tutelle du ministère de l’Éducation nationale, qui était chargée de la confection des manuels scolaires. Des instituteurs en faisaient partie. Aujourd’hui elle a disparu et vous voyez le résultat.

Dans vos revendications actuelles, quelles sont vos priorités? Est-ce l’indemnité de logement ?

Les enseignants du primaire ont beaucoup de problèmes et il faut agir sur plusieurs aspects. Quand vous louez une maison, on ne vous demande pas si vous êtes instituteurs. Nous touchons 40 000 francs CFA comme indemnité de logement. Il faut à ce niveau une revalorisation. Il y a également le profil de carrière. Le fait que les enseignants du primaire soient bloqués en A3 pose problème. Il faut leur permettre d’aller jusqu’en A7.

Qu’en est-il des cours le mercredi ?

II faut comprendre qu’à ce niveau les choses n’ont pas avancé. Nous avons participé à une évaluation avec le ministère, ces cours ne sont pas bons.

Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?

Qu’est-ce que le ministère recherchait à travers ces cours ? À augmenter le quantum horaire. Nous avons fait des propositions pour augmenter le nombre d’heures en dehors des mercredis. Ces cours ont bouleversé tous les programmes. Les enseignants sont obligés parfois de s’absenter le lundi, ce qui perturbe les emplois du temps.

Le ministère ne veut pas lâcher du lest...

Nous non plus n’allons pas laisser tomber. Nous avons apporté de nouveaux arguments, mais malgré cela le ministère est resté sur sa position. Son argument est que les résultats scolaires sont meilleurs. Pourtant ces résultats ne reflètent pas la réalité du terrain, avec la fraude qui sévit.

Aujourd’hui, faut-il revoir votre manière de revendiquer ?

Ce ne sont pas les déclarations tapageuses ou les menaces qui font avancer les luttes. Il faut savoir poser les problèmes. Certains sont extrémistes, d’autres négocient et font en même temps grève. Quand vous luttez, il faut tenir compte des acteurs politiques qui sont en place.

Quels sont les acquis ?

Nous avons fait grève mais nous sommes en train de négocier. Nous avons estimé que les instituteurs devraient terminer leur profil de carrière. Et c’est cet accord que nous avons trouvé avec le ministère. Nous avons abouti à l’organisation des concours A 3.  Nous avons aussi obtenu le concours des conseillers pédagogiques. Nous avons un déficit de 1 200 conseillers avec les 10 300 enseignants contractuels qui ont été recrutés. Nous avons aussi obtenu le concours des conseillers de COGES, au nombre de 682, dont les résultats vont être proclamés bientôt. Il faut savoir avancer doucement.  Ce n’est pas petit. Les négociations continuent, mais nous ne faisons pas de bruit. L’autre point sur lequel nous insistons, c’est qu’il faut raccourcir le délai de rappel des enseignants du primaire, qui va souvent jusqu’à 3 ans. Beaucoup d’enseignants sont obligés de s’endetter.

Entretien réalisé par Raphaël TANOH

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