En vue de la Journée mondiale des réfugiés, ce 20 juin 2024, RFI s’est rendue dans le nord de la Côte d’Ivoire qui accueille depuis 2021 un afflux constant de réfugiés burkinabè fuyant la crise sécuritaire dans leur pays. Selon le HCR, ils seraient 59 136, principalement des femmes et des enfants. Près de 12 000 demandeurs d’asile sont pris en charge dans deux sites d’accueil. Reportage dans celui de Niornigué, situé dans le Tchologo.
Le site d’accueil de Niornigué, situé dans le Nord de la Côte d’Ivoire, est conçu comme une cité à part entière : il y a plusieurs rangées de maisons en briques. Chaque famille y bénéficie d’un logement, raccordé à l’énergie solaire. Au centre de ce site, des femmes vendent des condiments et des denrées. Parmi elles, Awa : « Je vends des oignons et plusieurs produits. Dès que je gagne de l’argent, je pars rembourser le commerçant qui m’approvisionne en ville. Et le reste de la recette quotidienne me sert à nourrir mes enfants. »
Pour certaines femmes, le quotidien est rythmé par la recherche d’eau potable. Quatre forages alimentent près de 6 000 personnes. Or, les pannes sont fréquentes, comme l’explique Aïcha : « Je suis satisfaite par les services proposés ici. Même si pour avoir de l’eau, c’est compliqué : régulièrement, deux des quatre pompes ne fonctionnent pas. Je dois alors faire la queue et attendre longtemps avant d’avoir de l’eau. »
À l’origine de ce problème, un système mécanique, peu moderne et lent, selon Ibrahima Dosso, l’administrateur de ce site, qui mise sur l’arrivée prochaine d’organisations non-gouvernementales (ONG) : « Quand les partenaires viendront, nous souhaitons voir des systèmes plus sophistiqués qui nous permettent d’avoir l’eau en temps réel et même faire des raccordements pour faire des points de puisage un peu partout sur le site. » Autre projet : fédérer les femmes qui souhaitent monter de petits commerces, afin de les rendre autonomes.
« On va voir comment créer d’autres abris pour des classes »
À Niornigué, village situé à une trentaine de kilomètres de la frontière avec le Burkina Faso, les autorités ivoiriennes ont par ailleurs aménagé un espace temporaire d’éducation, où des demandeurs d’asile enseignent de manière bénévole aux plus petits. Car près de 57 % des demandeurs d'asile sont des enfants. Un des défis est, notamment, de les intégrer dans le système éducatif.
Dans une classe, plusieurs dizaines d’élèves révisent l’alphabet. Deux niveaux sont regroupés. Ibrahim, leur enseignant, est bénévole et demandeur d’asile. Sa priorité : assurer une continuité éducative aux enfants. « L’enfant doit arriver à s’exprimer, comprendre la grammaire et les mathématiques », souligne-t-il. À l’issue de la composition, on observe un taux de réussite de 64%. Donc, dans l’ensemble, ça va », juge-t-il, lorsqu'on l’interroge sur le niveau de ses élèves.
Cet espace temporaire d’apprentissage compte 725 enfants de niveau primaire. Il y a 12 classes, animées par des bénévoles. Un vide subsiste pour l’instant, pour les demandeurs d’asile du niveau secondaire, à l’image d’Awa. Cette élève de terminale est en Côte d’Ivoire depuis un an. « L’année que j’aurais dû consacrer au bac, je n’ai pas pu la faire, confirme-t-elle. Mais j’aimerais continuer mes études, parce qu’arriver à un certain niveau puis rester à la maison à ne rien faire, ça ne me plaît pas ».
L’un des partenaires du gouvernement, l’Unicef, espère toucher plus d’enfants du site d’accueil temporaire de Niornigué. Guy Richard Niamien, qui dirige le bureau de l'Unicef à Korhogo, explique : « On a eu un recensement qui a donné des chiffres de près de 600 à 700 enfants qui sont sur le site de transit. Donc, on va voir comment créer d’autres abris pour des classes. »
Parmi les autres chantiers figure enfin la prise en charge des adolescents hébergés dans des familles. Des recensements devraient être finalisés pour mesurer l’ampleur de leurs besoins. Avec en parallèle, une réflexion autour de leur intégration ou non, dans le système formel ivoirien.
Bineta Diagne ( RFI )