Quatre mois après, les tradipraticiens ont toujours la côte
Le 27 janvier, le gouvernement ivoirien avait interdit aux tradipraticiens tout acte de publicité dans l’exercice de leur métier, ainsi que l’utilisation des titres de docteur ou professeur. Quatre mois après, l’impact de l’interdiction semble à peine visible.
La médecine traditionnelle continue d’être le premier et le dernier recours de la majorité des ivoiriens malgré la réduction des publicités dans les journaux ou à la télévision, selon une habitante du quartier Selmer dans la commune de Yopougon à Abidjan.
«Depuis que j’ai pris ma grossesse, c’est Mémé qui s’est occupée de moi jusqu’à mon accouchement», affirme la jeune maman âgée de 30 ans. Mémé, comme elle est surnommée, est une quinquagénaire spécialisée dans la médecine traditionnelle.
Cette tradipraticienne dit ne pas avoir besoin d’affiche publicitaire pour s’attirer de la clientèle, car selon elle, ses résultats parlent en sa faveur.
Mais pour certains praticiens comme Lanciné Koné installé à Abobo, «faire la promotion» de ses services est une nécessité. Ainsi, ce spécialiste de la pharmacopée continue-t-il d’acheter des espaces publicitaires dans des journaux, à raison de 60.000 FCFA par mois. Seule condition exigée : détenir un document administratif justifiant de la qualité de tradipraticien. Il insiste cependant sur le fait que cette interdiction n’influence en rien son activité, car le bouche-à-oreille est l’instrument de communication par excellence, vu l’efficacité de ses traitements.
Un autre guérisseur Mamadou Traoré dont la décoction a la réputation d’être efficace, confirme que les Ivoiriens ont recourt à la médecine traditionnelle le plus souvent en dernier ressort. Selon lui, la médecine moderne ne soigne pas toutes les maladies surtout celles «d’origine mystique».
Ce qui explique que les malades s’en remettent à leurs savoirs, après avoir épuisé toutes les possibilités de traitements dans les hôpitaux sans obtenir satisfaction.
« L’interdiction des actes publicitaires n’a aucun impact sur mon activité », soutient-il en reconnaissant tout de même que si les publicités ne sont plus aussi abondantes comme par le passé dans les médias, elles prospèrent néanmoins sous la forme de distribution de prospectus dans les arrêts de bus, les rues et même les propriétés privées où des affiches placardées sur les murs invitent à s’offrir les services d’un guérisseur traditionnel.
Toutefois, les titres de docteur ou de professeur sont de moins en moins employés dans le milieu des tradipraticiens et des guérisseurs qui semblent avoir accepté cette mesure du gouvernement considérée par les habitués des soins aux plantes comme une décision tendant à décourager la pratique de la médecine traditionnelle ivoirienne, au profit des firmes pharmaceutiques occidentales.
Michèle Irié