Le phénomène des « microbes », ces enfants et adolescents délinquants, hante les populations abidjanaises de par son ampleur grandissante, créant un sentiment d’insécurité, avant le déclenchement de l’opération Épervier.
La violence des attaques de ces « jeunes désoeuvrés », a créé une psychose accentuée par le « manque d’action de longue durée de la police », selon un chauffeur de taxi, Karim Koné, habitant de la commune d’Attécoubé, au nord d’Abidjan, qui considère que les « Ivoiriens ont le droit de se défendre s’ils se sentent en danger »..À Treichville, un autre quartier populaire, « les policiers intervenaient rarement à cause de la grande insécurité, alors on s’occupait nous-mêmes des « microbes » parce qu’ils ne nous font pas de cadeau quand ils nous agressent », se défend Karim, citant l’exemple de Zama, 24 ans, l’ex-chef des « microbes », qui a été lynché à mort par une foule en colère en avril 2015. « D’autres moins connus mais aussi dangereux ont été tués (…) avec l’accord de tous », ajoute t-il. Au mois de mars dernier, c’est Pythagore, âgé de 18 ans et élève de seconde qui était mis à mort à coups de machette.
Aux dires de Daniel Atsé, un habitant d’Abobo, une autre commune réputée dangereuse, la justice populaire est due au « désespoir des populations qui se sentent obligées de se défendre », arguant que ces délinquants « se retrouvaient miraculeusement dans les rues » quand ils sont confiés aux autorités compétentes. Une fois libres, les « microbes » menaient des « représailles contre ceux qui les ont livrés ». C’est donc pour éviter de devenir des cibles que les populations préféraient se rendre justice euxmêmes. La justice reprend ses droits «L’opération épervier est une bonne initiative », estiment beaucoup, et « la justice populaire disparaîtra si les actions de la Police nationale sont bien menées », estime un anonyme. À Yopougon Cité Mamie Adjoua, « on n’entend plus qu’ils ont découpé quelqu’un », se réjouit Kaho Touré, habitant de ce quartier à l’ouest d’Abidjan, trois semaines après le début de l’opération dénommée “Epervier”. Menée conjointement par la police et des éléments du Centre de coordination des opérations décisionnelles (CCDO), une unité d’intervention mixte, et lancée mimai, elle vise à lutter contre le grand banditisme. L’opération s’est soldée par plusieurs interpellations, dont des cerveaux à Abobo, mais les « microbes » réfléchissent à « une autre stratégie, ils attendent que la police baisse la garde avant de frapper à nouveau », estime Kaho Touré.
E. FIE NDE & M. YA PI