Hamed Koné : « Nous ne sommes pas un syndicat »

Dans cette interview, l'Honorable Hamed Koné, Président du Conseil des suppléants députés de Côte d'Ivoire (CSD-CI) explique les raisons de la création de ce Conseil.

JDA : Que veut dire la suppléance, qui échappe à beaucoup d'Ivoiriens ?

H.K. : La suppléance est une disposition du système parlementaire qui existe dans de nombreux pays. En France, c'est depuis la 5ème République, dans le but d'éviter le cumul des fonctions, mais aussi le vide institutionnel. En Côte d'Ivoire, elle a été instituée par une loi de 2004 qui est entrée en vigueur à la seconde législature de la 2ème République, en 2011.

Elle consiste à établir une double candidature aux élections législatives : un candidat titulaire et un candidat suppléant. Une fois élus, le titulaire assure la pleine fonction et le suppléant reste en l'état, sans statut particulier.

En Côte d'Ivoire, il n'y a suppléance que quand le titulaire est appelé à une fonction incompatible avec celle de député. La suppléance est donc un remplacement temporaire. Au Burkina Faso, il y a suppléance en cas de démission ou de décès du titulaire, donc c’est un remplacement définitif, alors que l'incompatibilité est temporaire.

Nous estimons que la loi de 2004 est lacunaire. Le suppléant n'a pas d'immunité. Que fait-on quand, dans les liens de la justice, il doit répondre à la suppléance en cas d'incompatibilité ? Et quand le suppléant décède en cours de mandat il n'y a pas d'élection partielle. Qui assurera la suppléance en cas d'incompatibilité ? Ce sont des questions importantes.

JDA: Vous vous êtes constitués en association. Quels sont vos objectifs ?

H.K. : C'est de créer déjà un cadre associatif. Voyez-vous, ici, les Chefs et Rois ont existé en association avant leur institutionnalisation. Nous, nous sommes déjà dans l'institution parlementaire, sauf que notre place nécessite une amélioration. En Suisse, le titulaire siège au même titre que le suppléant. Quand le titulaire est absent à une séance, le suppléant peut être présent. Donc, comme le recommande la Résolution 2000 de Yaoundé de l'Assemblée Parlementaire de la Francophonie, dont la Côte d'Ivoire est membre et qu'elle a l'honneur de présider actuellement, il faut accorder un statut particulier au suppléant, qui empruntera quelques éléments à celui du titulaire. Cela pour éviter de très coûteuses élections partielles, d'autant que les deux ont constitué un même ticket électoral.

Notre association veut adopter des valeurs de solidarité à l’interne et de cohésion nationale. Si un suppléant a un problème social, l'association sera à ses côtés. Un suppléant qui décède nous saurons le pleurer, et un qui perd un parent, nous saurons être solidaires. Nous sommes d'horizons politiques divers, c'est une grâce pour la cohésion sociale. Et nous saurons être utiles.

JDA: Le suppléant perçoit-il une rémunération ?

H.K. : C'est un élément important de la condition actuelle du suppléant. Il n'a pas de rémunération allouée par l'État. C'est généralement le titulaire qui lui verse quelque chose. Là encore, vu qu'aucune loi ne le dit, le député n'est pas obligé. Cela dépend de la relation entre le député et son suppléant. Souvent, le candidat titulaire prend un suppléant pour juste assurer les formalités. Dans d'autres cas de figure, il prend un suppléant pour répondre à la géopolitique, à une sorte de stratégie électorale. C'est cela qui détermine la suite de leur collaboration.

Mais il y a des suppléants qui ne sont pas à 200 ou à 300 000 francs CFA près. Des suppléants qui n’ont rien à envier à leurs titulaires. Il ne s'agit donc pas seulement de salaire. Il y a des maires qui n'ont que 300 000 francs et des adjoints au maire qui n'ont que 50.000 francs. Mais ils ont un statut d'élu.

JDA : Quels sont vos moyens d'actions ?

H.K : Pour chaque objectif, il y a un mode d'action. Pour accéder à un statut particulier, nous n'avons pour seul moyen que l'approche et le plaidoyer. C'est le lieu de noter que notre association n'est nullement à connotation revendicative ou syndicale. Le Conseil n'est pas un syndicat et ne saurait en être un. Il est vrai que nous relevons les insuffisances, mais nous voulons contribuer à renforcer l'institution. Notre approche se dirige aussi bien vers l'Exécutif, c'est-à-dire le gouvernement, que vers le Parlement.

JDA: Combien de suppléants compte votre association ?

H.K. : Nous sommes 225 élus suppléants au total. Tout le monde est considéré comme membre du Conseil. Mais, à ce jour, seuls 167 ont adhéré. C'est beaucoup en seulement deux mois. Vu que nous n'avons pas de base de données préétablie, nous entrons en contact avec tous nos pairs, ceux qui siègent comme ceux qui ne siègent pas.

JDA : Comment ceux qui siègent ?

H.K. : Oui, parce qu’élus à la suppléance ils siègent le temps que leur titulaire est dans l’incompatibilité. Demain, ils peuvent perdre ce privilège.

JDA : Quel cadre de collaboration avez-vous avec les députés ?

H.K. : Ils sont nos parrains. Certains seront membres d'honneur pour leur attachement à l'association, comme le disent nos textes. Le suppléant est à leur image. Par exemple, quand on présente une doléance au suppléant, cela s'adresse au député. C'est donc un cadre d'amitié, d'entente et de solidarité entre le député et son suppléant.

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