Affaiblie durant la crise post-électorale de 2011, la fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI, le plus ancien et le plus influent syndicat de l’école ivoirienne, créée en avril 1990) retrouve ces derniers temps son fauteuil de principal syndicat pour la défense des droits des élèves et des étudiants. Un nouveau souffle impulsé par Assi Fulgence Assi, dit AFA, son actuel secrétaire général.
En juillet 2014, le nouveau dirigeant de la fédération estudiantine promet de « réactiver la FESCI » au cours de sa dernière assemblée générale élective. Un pari qu’il tient visiblement au regard du poids actuel de ce mouvement syndical.
Lutter pour « permettre à mes camarades et moi d’avoir de meilleurs conditions de travail », AFA dit avoir été piqué par le virus du don de soi depuis le Lycée moderne de Bonoua (63 km au sud d’Abidjan) où il est né et a grandi.
Un idéal que le jeune leader aujourd’hui à peine trentenaire n’a pas perdu de vue jusqu’à son admission à la faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université Felix Houphouët Boigny de Cocody (principale université publique du pays).
« Engagé et rassembleur », selon certains de ses amis de lutte, AFA est élu secrétaire de la FESCI de son unité de formation et de recherche (UFR). Un poste qu’il occupe jusqu’à la fin de la crise postélectorale d’avril 2011 et la fermeture des universités publiques par les autorités actuelles du pays (pour réhabilitation).
En septembre 2012, lorsque les universités ouvrent de nouveau, AFA, 1, 65 mètre, calme mais déterminé, reprend son bâton de pèlerin.
Estimant « précaires, difficiles et inadéquates » les conditions d’étude et de travail dans les universités publiques de Côte d’Ivoire, « surtout après leur réhabilitation à coût de centaines de milliards». Il décide d’organiser une assemblée générale élective pour doter les élèves et étudiants d’un interlocuteur capable d’exposer leurs problèmes à l’autorité de tutelle.
Il est contesté par Mian Augustin (ancien secrétaire général de 2007 à 2011), qui pense que « les conditions sécuritaires, sociales et surtout financières ne sont pas réunies » pour une telle initiative.
AFA s’entête et organise le congrès qui le porte à la tête de la fédération du plus influent syndicat de l’école ivoirienne. En 2015, il lance un mot d’ordre de grève générale qui est suivi dans la quasi-totalité des établissements publics du pays et même dans quelques-uns du privé.
Cette action entraine des échauffourées entre la FESCI et la police. Des voix se sont élevées pour dénoncer l’attitude des deux camps qui se sont affrontés, principalement sur les campus universitaires. « Les revendications de ces enfants sont tout à fait justifiées. Mais, ils ont une manière de protester qui n’honore pas l’école ivoirienne », avait laissé entendre Kouassi Jonson Zamina, secrétaire général de la Coordination Nationale des Enseignants du supérieur et des Chercheurs de Côte d’Ivoire (CNEC).
En dépit de ces critiques, « AFA » ne lâche pas prise. Il renouvelle ses actions de paralysie de l’école ivoirienne jusqu’à exacerber les autorités ivoiriennes, lorsqu’il s’oppose en mars au projet de récupération par l’Etat des cités universitaires à l’occasion des 8e jeux de la Francophonie de juillet 2017. Le leader syndical est arrêté et jeté en prison pour « trouble à l’ordre public ».
En avril, Assi Fulgence sort de la maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) où il était détenu.
Son passage carcéral le rend célèbre. Il est sollicité autant par des journalistes que par des organismes des droits de l’homme de tous les horizons qui veulent en savoir plus sur ce syndicaliste qui a réussi à « réactiver » la FESCI. Son nom figure même parmi les cinquante personnalités qui font bouger la Côte d’Ivoire selon une enquête du journal Jeune Afrique.
Aujourd’hui, en seulement deux années de lutte acharnée, celui qui a impulsé un nouveau souffle à la FESCI dit « ne pas avoir d’ambition politique pour l’instant ». Une nouvelle vie que les superstitieux qualifieraient de prévisible au regard du slogan de cette fédération : « FESCI, toujours ! ».
Ange Tiémoko