Les détenus de la crise post électorale de 2011 hument l’air de la liberté. La mesure d’amnistie prise par le Président Alassane Ouattara ne fera certainement pas oublier les efforts de maitre Rodrigue Dadjé qui a été durant le temps des procès un véritable rempart contre les arguments de l’accusation.
On pourrait l’appeler le « Jacques Vergès » ivoirien qu’on ne s’y tromperait pas tant l’homme s’est caractérisé pour sa passion pour la défense de cas parfois à la limite du désespéré. Militant assumé du Front populaire ivoirien (FPI) c’est de façon presque naturelle qu’il se retrouve à l’avant garde du combat en justice pour la libération de ceux qui ont toujours été ses mentors politiques.
Avocat diplômé en droit des affaires, c’est au début des années 2000 qu’il commence à côtoyer les milieux proches de l’ex régime ivoirien. Il débute sa carrière sur des chapeaux de roues en se voyant confier des dossiers tous aussi sensibles les uns que les autres. Très proche de Simone Gbagbo qui l’a « adopté comme un fils » et à qui elle se confie régulièrement, Maitre Rodrigue Dadjé est depuis lors au cœur du système judiciaire des Gbagbo. En 2007 il se voyait confier l’épineuse question de la disparition du journaliste canadien Guy André Kieffer dans laquelle sa cliente était citée parmi les principaux suspects. Plus tard quand éclate le scandale des malversations financières dans la filière café cacao il est encore présent pour tenter de sauver la tête des barons du FPI englués dans une affaire pour laquelle ils risquaient gros. S’il est coopté malgré son jeune âge et son manque d’expérience pour plaider dans des dossiers aussi brulants c’est parce qu’il est connu pour son « incroyable culot et son goût acharné pour le travail » reconnaissent certains de ses confrères.
Retranché à Paris durant les heures chaudes de la crise, l’avocat regagne la Côte d’Ivoire un an plus tard pour organiser la défense de l’ex première dame et d’autres détenus. En plus de plaider pour l’innocence de ses clients, chaque procès est pour lui l’occasion de tancer le régime ivoirien qu’il accuse de « mener une chasse aux sorcières avec une justice aux ordres ». Une stratégie de défense qui lui a rarement valu des lauriers mais qu’il n’a pas abandonnée pour autant.
L’annonce de l’amnistie de l’ensemble de ses clients lui a fait pousser un ouf de soulagement comme à la plupart des ivoiriens. À 44 ans il regarde désormais vers la Haye, où il n’a jamais caché ses intentions d’aller défendre la cause de Laurent Gbagbo et de son ami Charles Blé Goudé.
Malick SANGARÉ