Peu après sa réélection à la présidence ivoirienne en octobre 2015, Alassane Ouattara annonçait : « je n’exclus pas de ne pas finir mon deuxième mandat. Si après trois ou quatre ans, ça va bien, pourquoi ne pas demander à un vice-président de prendre les choses en main ? ». Inscrit au programme de la réforme constitutionnelle prévue cette année en Côte d’Ivoire, ce tout nouveau poste de vice-président nourrit déjà les débats.
Les indices donnés par M. Ouattara restent encore assez maigres pour deviner les pouvoirs de la personne qui pourrait l’assister au sommet de l’Etat. Tout juste sait-on qu’il « voudrait [s]’inspirer des meilleures pratiques » pour choisir la personne qui le remplacerait en cas de vacance du pouvoir.
En la matière, plusieurs modèles existent, et c’est en Afrique anglophone que les postes de vice-président sont les plus répandus dans le monde. Une région qui inspire le successeur de Laurent Gbagbo, qui prenait en exemple le Ghana, le Nigéria et l’Afrique du Sud.
Le vice-président « à l’ivoirienne » ressemblera-t-il au « président remplaçant » d’Afrique du Sud, nommé par le chef de l’Etat et doté des pouvoirs présidentiels lorsque celui-ci est à l’étranger ? S’agira-t-il d’un membre d’un parti politique âgé d’au moins 40 ans, dont les pouvoirs dépendent de la délégation du président, comme stipulé dans la constitution nigériane ?
« On ne sait pas encore ce que les politiciens nous réservent, surtout que cette question relève du jeu politique », répond Sébastien Yébo, constitutionaliste à l’université de Cocody. Mais quelles que soient les prérogatives qui lui sont confiées, l’arrivée d’un vice-président à la tête de l’exécutif ivoirien ne sera pas sans effet sur la vie politique et ses conseils des ministres parfois tumultueux.
D’une part, le pouvoir d’Etat sera incarné par deux personnes, contrairement à ce qui se fait actuellement. S’il est trop tôt pour dire que le Premier ministre disparaîtra, son influence diminuera en tous cas, car il ne sera plus que la troisième figure du gouvernement. Un trio gouvernant (président, vice-président, Premier ministre) qui offrirait également plus de possibilités pour maintenir l’unité d’une coalition aussi large que celle actuellement au pouvoir.
D’autre part, suivant le modèle que le président ivoirien choisirait d’imiter, le rôle de Vice-président pourrait s’avérer stratégique, reléguant le président de l’Assemblée national un rang plus loin dans l’ordre de succession. En effet, l’enjeu véritable de la création de cette fonction en Côte d’Ivoire comme ailleurs pourrait se résumer en cela : la succession.
En Afrique du Sud, les présidents Zuma et Mbeki ont été vice-présidents avant d’accéder au pouvoir, tout comme les Nigérians Obasanjo et Jonathan. Comme si la fonction offrait un peu de stature présidentielle avant l’heure.
Ange Tiémoko et Noé Michalon