Marcher sur un fil n’a jamais été un exercice facile. Thierry Tanoh, qui vient d’être démis de ces fonctions de ministre du Pétrole et de l’énergie, ne dira pas le contraire. Il vient grossir le rang des victimes collatérales de la guéguerre entre houphouëtistes.
Thierry Tanoh (56 ans) serait volontiers resté encore au gouvernement si cela ne dépendait que de lui. Mais le rôle de funambule qu’il jouait depuis la formation du dernier attelage était devenue intenable. La tension entre le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI RDA), son parti, et le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) avait atteint un point tel qu’il n’y avait plus de places pour les indécis. Il y a 10 jours environ, la rumeur de sa démission avait circulé sur les réseaux sociaux. Rumeur vite démentie par les services de son ministère, ce qui en disait long sur la volonté du Thierry Tanoh de poursuivre sa mission à la tête de cet important département.
Cet ancien cadre de la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque Mondiale, a été le premier africain francophone à avoir occupé un poste de Vice président opérationnel au sein d’une des institutions de Bretton Woods. Diplômé de Harvard, le désormais ex ministre du Pétrole n’en est pas à ses premières difficultés. L’on garde encore en mémoire son passage conflictuel à la direction du groupe Ecobank. L’expérience avait tourné court, avec à la clé un procès.
Inconnu de la scène politique ivoirienne, il intègre en 2014 la présidence de la République en tant que Secrétaire général adjoint. Le technocrate ne met pas de temps à entrer dans les bonnes grâces du Président de la République, Alassane Ouattara, qui fera de lui son ministre du Pétrole et de l’énergie lors du dernier remaniement ministériel. Les querelles politiques entre frères houphouëtistes et des « insuffisances de résultats » à la tête de son département auront finalement raison de lui. Désormais libre de tout engagement gouvernemental, ce proche d’Henri Konan Bédié, pressenti pour figurer sur la short-list des potentiels candidats du PDCI RDA en 2020, pourrait faire son baptême du feu en descendant véritablement dans l’arène pour se tailler un costume de présidentiable. Ce pourrait bouleverser un paysage occupé par un certain Jean-Louis Billon, dont les ambitions pour 2020 ne sont plus un secret. Une chose est sûre, ce limogeage fait de lui l’une des figures du « refus » au PDCI et le positionne haut dans l’estime des militants. Mais il devra batailler durement s’il veut une reconnaissance politique. Jamais élu, un futur succès dépendra de la posture qu’il adoptera désormais. Il n’est pas un va-t-en guerre et son tempérament conciliant pourrait le desservir.
Malick SANGARÉ