Après les découvertes d’armes et l’arrestation de Souleymane Kamaraté, Docteur Arthur Banga, chercheur, spécialiste des questions de sécurité répond aux questions de JDA.
Près de sept ans après la crise, on parle encore de caches d’armes et l’on ignore la quantité d’armes encore cachées ou en circulation. Peut-on dire que le succès de l’opération de démobilisation et de désarmement, saluée par les Nations unies, a été surestimé ?
L’opération de démobilisation, comme toute œuvre humaine, n’est pas parfaite et il est bon de le rappeler. Le procureur de la République, dans sa conférence de presse du lundi 9 octobre, a parlé de six tonnes d’armes trouvées dans un domicile. Je ne crois pas qu’à l’origine, le désarmement et de la démobilisation avaient pour objet de s’occuper des armes lourdes. La principale cible était plutôt les ex-combattants, qui détenaient des armes individuellement. Si on doit juger les instances chargées du désarmement, ce n’est pas sur ces caches d’armes. La recherche de caches d’armes est une mission qui doit relever du renseignement, de la police et de la gendarmerie. Il appartient à ces unités de travailler, avec le soutien des populations, afin de découvrir les armes probablement encore cachées.
La mise sous mandat de dépôt de Souleymane Kamaraté est-elle un signal fort de la justice ou la simple expression d’un divorce entre alliés ?
Le contexte peut prêter à confusion. Les fonctions de Souleymane Kamaraté, dit Soul to Soul, prêtent également à confusion. Mais, logiquement, nul n’est au-dessus de la loi et il est difficile de se prononcer pour l’instant sur cette question, d’autant qu’on ne dispose que de très peu d’éléments. Cela dit, le commun des mortels serait choqué de constater que six tonnes d’armes se retrouvent chez un citoyen sans que ce dernier ne réponde à la justice. C’est un minimum de bon sens. Il faut espérer que le procès se fasse équitablement et que l’on comprenne le processus qui a conduit à cette cache d’armes. Les Ivoiriens ont besoin de savoir tout sur ces caches, car il s’agit aussi de leur sécurité. Mais ayons à l’esprit le communiqué de Guillaume Soro, publié le jour même de la mise aux arrêts de Soul to Soul, dans lequel il demande à la justice de faire son travail en toute clarté et indépendance. Bien que l’affaire puisse avoir des relents politiques, comme il le mentionne.
La Côte d’Ivoire, à ce stade, a-t-elle définitivement tourné le dos à une crise militaire ?
Espérons que les mutineries et autres soient derrière nous. Mais au-delà de l’espoir et des pronostics, c’est surtout les mesures que nous prenons pour ne plus avoir de crises qui doivent intéresser. Les premiers pas du nouveau ministre en charge de la Défense sont intéressants en termes de moral et de proximité des troupes. Ses visites sur le terrain sont plutôt bien appréciées des militaires et cela leur donne de l’espoir et le sentiment d’être écoutés. Le gouvernement a annoncé des fonds pour le cadre de vie des militaires et il faut des réformes plus profondes en termes d’équité, de discipline et de cohésion des troupes. La formation, la mise en place d’outils de réflexion stratégique et l’entrainement doivent très vite suivre.
Ouakaltio OUATTARA