L’élection présidentielle d’octobre 2020 devait tourner la page de près de 20 ans de présence politique de trois grands leaders, Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo. Mais les choses s’annoncent autrement.
La page des trois grands leaders qui crispent la vie politique ivoirienne depuis 1993 ne sera pas tournée de sitôt. Même s’il s’est retiré de la course présidentielle, le Président de la République, Alassane Ouattara est encore très présent dans le jeu politique. Encore dans ses ennuis judiciaires, Laurent Gbagbo n’a pas renoncé à sa volonté de jouer un rôle principal dans la vie de son parti et dans la reconquête du pouvoir. Seul en lice pour la présidence actuellement, Henri Konan Bédié pourrait bien ramener au-devant de la scène. Les anciens adversaires ou alliés évoluant dans un espace politique qui attend depuis longtemps un passage de flambeau.
Génération sacrifiée ? Le tableau qui se dessinait mettait tantôt face à face, tantôt côte à côte des personnalités politiques comme Amadou Gon Coulibaly, Pascal Affi N’Guessan, Jean-Louis Billon, Hamed Bakayoko, Guillaume Soro, etc. Présents depuis une vingtaine d’années pour la plupart près de leurs leaders, certains d’entre eux seront encore obligés de jouer les seconds rôles, alors qu’ils se positionnaient comme des héritiers putatifs. Mais les « trois grands » semblent n’avoir pas encore « vidé leurs contentieux ». La nouvelle génération devra attendre et continuer à mener le combat pour ses leaders. Même s’ils tentent de s’affranchir, Affi N’Guessan et Guillaume Soro sont encore les otages d’un système dans lequel ils ont fait leurs armes et qu’ils ont contribué à renforcer dans l’estime de l’électorat ivoirien, qui a du mal à s’en défaire. 2020 ne sera plus l’année de la reconfiguration politique telle qu’attendue, mais plutôt un remake de 2010 et donc « une prolongation de la crise », craint un diplomate. « La politique ivoirienne n’a pas évolué d’un iota depuis plus de vingt ans. Nous avons des acteurs qui changent juste de rôle et des partisans pris en otages avec leur propre complicité », lance Firmin Kassi, sociologue. Selon lui, il faudra attendre encore bien longtemps avant de parler d’une reconfiguration politique et surtout d’un changement radical au niveau des alliances et du combat que se mènent le RHDP, le PDCI et le FPI, sous les yeux impuissants d’autres partis, qui ont du mal à se frayer un chemin et à faire entendre leur voix.
Ange-Stéphanie DJANGONE