Président de l’Association Citoyens & participation (CIVIS) Côte d’Ivoire depuis 2015, Christophe Kouamé, Docteur en Pharmacie et ancien Interne des hôpitaux a été le Coordonnateur national (2012 - 2014) de la Convention de la société civile Ivoirienne (CSCI). Dans l’interview qu’il nous a accordée, il parle des nouvelles institutions de notre pays.
En quoi la mise en place d’institutions comme le Sénat et la Haute cour de justice contribue-t-elle au renforcement de la démocratie ?
Vous voulez dire au renforcement de l’État de droit ? L’État de droit est un système institutionnel dans lequel la puissance publique est soumise au droit. Et, pour un fonctionnement optimal de l’État de droit, il faut nécessairement un équilibre au niveau des trois pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire.
En mettant en place le Sénat et la Haute Cour de Justice, l’on consacre l’équilibre desdits pouvoirs. De la sorte, l’exercice du pouvoir étatique se fait dans le respect des lois en vigueur. Toute chose qui devrait permettre aux citoyens informés et engagés d’exercer efficacement un contrôle citoyen de l’action publique.
Pensez-vous que le Sénat apportera véritablement un plus au débat et aux avancées démocratiques ?
Ce n’est pas l’institution en tant que système de gestion de l’espace politique qui va de facto apporter un plus aux avancées démocratiques. Le Sénat, en tant qu’institution, reflètera l’image que les citoyens, l’opposition et les dirigeants lui donneront. Ce sont les citoyens, les gouvernants, l’opposition politique et toutes les parties prenantes de l’espace public qui rendent les institutions fortes. Investies de tels pouvoirs elles ne pourront que participer aux avancées démocratiques.
Pensez-vous que la mise en place de la Haute Cour de Justice sera effective avant la fin de l’année 2018 ?
Selon l’article 160 de la Constitution de 2016, elle est composée de Députés et de Sénateurs, en nombre égal. Étant donné que ces deux institutions sont mises en place, cela ne devrait pas poser de problème. En principe, cette mise en place devrait intervenir juste après celle du Sénat, c’est-à-dire probablement après le 12 avril 2018.
Au sein des Ivoiriens se manifeste parfois un sentiment de méfiance vis-à-vis de nos institutions. Pensez-vous que la Haute Cour de justice pourra rassurer tout le monde ?
Dans les faits, aucune institution ne peut en elle-même rassurer les Ivoiriens. Ceux-ci ne seront rassurés qu’à deux conditions. La première est que l’animateur principal de l’institution en fasse un outil au service de l’intérêt général et la seconde est qu’il est de la responsabilité de l’Ivoirien de s’informer sur ses propres institutions et leurs fonctions. Cela conditionnera sa liberté d’action et lui permettra de développer un plus grand sens critique. Par ailleurs, un tel individu, conscient des enjeux politiques et économiques, sera en mesure d’exercer un droit de regard sur les actions de ces institutions. Cette participation citoyenne de l’Ivoirien devrait, de toute évidence, amenuiser sa méfiance à l’égard des institutions. En définitive, l’Ivoirien, au lieu de se complaire dans les plaintes, devra faire preuve de responsabilité en s’informant sur les institutions de son pays.
La Côte d’Ivoire compte aujourd’hui au moins 13 institutions. N’est-ce pas un peu trop, sans véritable incidence sur la démocratie ?
Je ne sais pas si cela est trop. Par contre, le nombre des institutions est défini par la Constitution de chaque pays, en fonction du régime politique choisi et de sa trajectoire historique. Peu importe le nombre des institutions, le vrai problème est : est-ce que ces institutions jouent ou non le rôle pour lequel elles ont été créées ?
Je vous retourne la question…
Oui, pour la majorité d'entre elles. Par contre, certaines institutions devraient être reformées en profondeur. C’est par exemple le cas de la Grande Chancellerie, du Médiateur de la République, ainsi que du Conseil économique, social, culturel et environnemental.
Ouakaltio OUATTARA