Arrêté à Accra puis extradé à Abidjan en 2013, Jean Noël Abehi comparait pour la seconde fois devant un tribunal à Abidjan. Pour cette affaire, où il risque 20 ans de prison, l’ancien Commandant de la gendarmerie plaide non coupable et accuse.
En 2003, alors que la crise militaro-politique bat son plein, Laurent Gbagbo décide de faire la promotion de jeunes officiers ivoiriens, longtemps restés dans l’antichambre de l’armée. Jean Noël Abéhi apparait alors sur la scène dans le plus grand camp de gendarmerie de Côte d’Ivoire, Agban, où il remplace le Commandant Dja à la tête Groupement d’escadron blindé (GEB), l’unité la mieux équipée et la mieux entrainée de la gendarmerie nationale. Il ne lui faut pas beaucoup de temps pour se familiariser avec ses hommes et gagner la sympathie de ceux-ci.
Combatif Formé dans les écoles de gendarmerie ivoiriennes, l’ancien Commandant du GEB est un fervent chrétien. Une foi à toute épreuve, qui lui a souvent fait penser que sa mission dans l’armée avait un caractère divin. D’un tempérament « très nerveux », comme il se décrit lui-même, il a été très affecté par l’attaque armée qu’a subi la Côte d’Ivoire le 19 septembre 2002. « Quand on attaque mon pays, la Côte d'Ivoire, le seul que j'ai sur cette terre, l'Esprit Saint réalise en moi quelque chose d'extraordinaire. Voyez-vous, où nous sommes assis là en ce moment, si quelqu'un lançait un pétard, je serai le premier à prendre la fuite. Mais quand il s'agit d'une action militaire dirigée contre mon pays, je vous assure que je deviens immédiatement une autre personne. Et ce n'est qu'après mes interventions sur le terrain que je réalise ce que j'ai fait », confiait-il à certains de ses proches. Très amer vis-à-vis de la classe politique ivoirienne et de ces choix, notamment les accords politiques de Ouagadougou, qui selon lui n’étaient pas à même de ramener la paix en Côte d’Ivoire, Abéhi n’a jamais caché son penchant pour un règlement militaire de la crise. « Je suis convaincu qu'il y a une dernière guerre que je dois livrer contre l'ennemi pour une paix définitive en Côte d'Ivoire. Il y aura une guerre de libération et cette guerre, je vais la faire», a-t-il assené en 2010, alors qu’il se trouvait en pèlerinage à Lourdes.
Après un exil mouvementé au Ghana, l’ex officier supérieur de la gendarmerie livre un autre combat, cette fois devant les tribunaux. Purgeant déjà une peine de 5 ans de prison et radié des effectifs de l’armée, il ne part pas avec les faveurs des pronostics. Mais l’ancien homme fort du camp d’Agban est déterminé à prouver son innocence.
Malick SANGARÉ